Jaz et horlogerie en Belgique

Petite histoire belge : Belgique et horlogerie ne sont pas des mots que l’on associe intuitivement, et pourtant le pays n’a pas toujours été en reste dans ce secteur. Au XVIII°siècle, Liège devint une ville d’horlogers hors pair. Gilles de Beefe (1694+1763) et Hubert Sarton ( 1748+ 1812) ont dominé de leur personnalité toute une génération d’excellents horlogers mécaniciens. L’invention la plus célèbre de Hubert Sarton est la montre automatique à rotor. En la mettant au point, l’horloger a tout simplement révolutionné la technique horlogère. C’est en effet grâce à lui que les montres se remontent automatiquement. Malheureusement, ces autres horlogers hors ligne que sont les Boty, Gilles et Henry de Herve, Dieudonné Kinable, Lambert Joseph Laguesse, Michel Joseph Ransonnet, les Rossius, Gilles et Emile Rouma, Remacle Sotiau, et bien d’autres encore, sont totalement oubliés. Au tout début du XIX°, il y eut plus de cinq cents horlogers à Liège, mais qui se rappelle encore leurs noms ? Pas même les belges! Signe des temps et du recul de l’horlogerie domestique, de nos jours parmi les fournisseurs officiels de la Cour de Belgique, il n’y a que Cobimo-Cosyns, un distributeur de montres, uniquement, pas d’horloges, ni de réveils, évidemment. En revanche Michaël Van Gompen, de la Sprl Horlogerie Ancienne, est fournisseur breveté de la Cour de Belgique et il ne manque pas d’activités, en raison de l’impressionnant patrimoine des Palais Royaux.

Néanmoins au XX° la place du plat pays dans le paysage horloger s’effrite et le petit royaume n’a pas pris le tournant de l’industrialisation horlogère, laissant la place libre pour Jaz qui s’implante très tôt – dès les années 20 – sur ce marché si proche culturellement, économiquement et géographiquement. Nos voisins d’outre-Quiévrain partagent, outre la langue pour grande partie, des goûts communs, des habitudes de consommation et un pouvoir d’achat quasi identiques. Toutefois il s’agissait d’un trop petit marché et surtout trop proche pour y implanter un centre de production d’autant que les formalités et frais de douanes étaient supportables, comme pour tant d’entreprises françaises qui y exportaient leurs productions depuis des siècles. Pour ces raisons de proximité, la marque au jaseur boréal ne voit pas en la Belgique qu’un simple marché supplémentaire mais aussi un laboratoire d’essais et de tests. De nombreux Jaz ont été d’abord vendus aux belges au titre de marché-test. Cette stratégie permet de mesurer à moindre échelle, et donc à moindre coût, l’attrait des consommateurs ciblés en prenant moins de risque. La zone d’étude de marché peut se concentrer sur une ville, une région ou encore un pays, comme c’est le cas en l’espèce.

Le catalogue bilingue belge de 1950, en notre possession, nous affiche trois Jaz qui ne passeront pas la barre d’un test annuel et ne seront donc jamais distribués en France : CREUSIC , DROPIC et COQUIC .

Ces deux  OFFIC ont été acquis en Belgique, ce qui  justifie les quelques différences que l’on trouve parfois aussi sur d’autres Jaz destinés à l’export. Ainsi, pour celui de droite, le décor de son cadran n’est pas bicolore mais entièrement argenté et l’inscription transistor n’est pas dans la police de caractère habituelle utilisée par Jaz. La variante rouge de gauche n’est pas répertoriée. Les OFFIC y sont appelés CYRANO comme en Italie, rompant avec la tradition des noms en deux syllabes se terminant en-IC , ainsi que d’autres Jaz devenus ARAMISARC de TRIOMPHE, ARLES, ATHOS , CHAMBERY , D’ARTAGNAN , EIFFEL LOURDESMILORDOPERA , PORTHOS , RICHELIEU , TALLEYRAND   TROCADERO  ou  VENDÔME .

Vues récentes de l’ancien siège de Jaz Bruxelles au 22 rue Grand-Hospice
22 rue Grand-Hospice, quartier du Béguinage, à Bruxelles

Consultez notre article Jaz à l’exposition universelle de Bruxelles 1958

Le siège de Jaz Belgique, au 22 rue Grand hospice se trouvait donc dans le quartier central de Bruxelles , proche de celui des Quais. Au centre de la carte, la célèbre bijouterie De Witte, à laquelle nous avons consacré un long article illustré en tant que distributeur historique de Jaz à Bruxelles.

1948 annuaire professionnel de la ville de Bruxelles
1949 annuaire professionnel de Bruxelles
l’encart à gauche donne le nom du directeur de Jaz Belgique : H.L de Condé

Afin de compléter notre visite horlogère chez nos chers voisins, pour la période contemporaine, il faut aborder le domaine des montres, exclusivement. Certaines entreprises belges travaillent pour donner leur propre vision et leur interprétation personnelle de ce qu’est l’horlogerie, et d’autres grandes maisons internationales, qui s’étaient misent à bouder le marché belge pendant une période, semblent revenir en force ces derniers temps ( suite à des désaccords entre distributeurs, les montres Citizen avaient, par exemple, disparu d’une grande partie du territoire belge pendant des années). La France voisine à une histoire horlogère forte qui renaît de ses cendres depuis quelques années. De plus en plus de sites et de blogs horlogers de qualité voient le jour, Jazlebontemps s’y taille sa petite part pour les réveils et horloges, et partagent régulièrement les succès-story  « Made In France » dans le secteur à travers des articles complets et des vidéos qui font l’objet de vraies recherches. Le marché horloger français est composé de certaines marques d’antan que l’on voit revenir sur le devant de la scène comme LIP, ainsi que de nouvelles figures du secteur avec de jeunes horlogers passionnés bien décidés à montrer que l’hexagone n’a pas dit son dernier mot en matière de montres, comme Cambronne à la bataille de Waterloo, à 20 kilomètres au sud de Bruxelles.

D’ailleurs notre cher Julien Clairet, antiquaire de marques, gérant de Brand Access, actuel propriétaire de la marque Jaz, qui a déjà tenté une renaissance de la marque, il y a quelques années, nous réserve cette belle surprise en exclusivité. Les productions et les volumes des français sont bien maigres, lorsque l’on les compare aux montants et aux chiffres des géants suisses et japonais, mais les idées, la créativité et le savoir-faire sont bien présents. Le paysage horloger belge a de nombreuses similitudes avec ce constat français.

Quelques maisons se développent à leur rythme en Belgique en proposant des produits originaux et travaillés. C’est le cas par exemple de la marque Armogan qui propose des montres sportives inspirées de modèles vintages dans le secteur de la course automobile. Gavox est un autre bel exemple d’une maison belge qui prend de l’ampleur. Leurs montres se concentrent sur des styles en rapport avec l’exploration terrestre, aérienne ou marine et sous-marine. La marque Ice-Watch, le plus grand acteur belge, mais tout le monde ignore cette origine, fait un bruit phénoménal dans le secteur depuis quelques années. La marque a repris certains code du géant Swatch pour développer une marque très à la mode chez les jeunes. On notera même le retour de la célèbre marque Cadillac dont nous avons narré l’histoire rocambolesque de sa communication dans l’article De Witte.

De Witte horloger affilié Jaz à Bruxelles

Bijouterie Horlogerie De Witte, photo prise en 1981, Petite Rue au Beurre à Bruxelles, numéros 13/15 et 17. Les publicités en façade se partagent entre PONTIAC pour les montres et JAZ pour les réveils et les horloges.
L’enseigne lumineuse Jaz, arbore le slogan Le réveil précis en néon.
De jour, le slogan Le réveil précis est peu lisible
De nuit l’enseigne est éblouissante et surmonte un rideau de fer peint aux couleurs de Jaz; Nous ne connaissons pas d’autres exemples de ce type de support publicitaire pour la marque Jaz, vous noterez qu’un Manneken-Pis orne le panneau pour Pontiac.
De Witte occupait les deux côtés de la Petite Rue au Beurre assurant une belle visibilité pour Jaz en plein centre du Bruxelles historique et touristique.
Photo extraite du site de la Maison de Witte qui prospère encore de nos jours.
Fondée en 1932 par Paul De Witte, elle est une des plus anciennes et une des rares horlogeries indépendantes bruxelloises ainsi qu’une véritable institution locale, en raison entre autres , de ses multiples boutiques dans la capitale belge. La maison De Witte démarre rue de l’Eglise à Shaerbeek, puis passe à Forest rue des Alliés avant de gagner Bruxelles. En 1958 lors de l’Exposition Universelle, où Jaz recevra une médaille d’or, Nicole de Witte rejoint son père dont l’entreprise sera dirigée pour les trois générations suivantes par des femmes. De Witte fait sa publicité et celle de Pontiac, grâce à ces maillots jaunes dont la Belgique regorge. Ils organisent ensemble un Rallye Pontiac dans les rues de Bruxelles et des jeux-concours dans les revues du Benelux dont les bulletins de participations remplissent des dizaines de sacs postaux.
Photo extraite du site de la Maison de Witte : à droite Monsieur Paul de Witte; à gauche et en bas: la deuxième boutique de l’autre côté du bout de la Petite Rue au Beurre avec ses horlogers réparateurs à leurs bureaux accolés aux grandes baies vitrées. Ces ouvriers assuraient également la création ou transformation de bijoux et la gravure des montres et bijoux. Cette dernière activité reste de nos jours une spécialité de la maison qui fournit aux grandes administrations belges des montres personnalisées en guise de cadeaux officiels. Pontiac, dont on voit la grande horloge publicitaire à l’étage, est une marque suisse de montres, dont nous résumons l’histoire en fin d’article.
Photo extraite du site de la Maison De Witte: toujours très au fait en matière de communication, le bijoutier assurait de nombreuses animations devant ses boutiques.
Acculée à l’Eglise Saint Nicolas, il existait depuis le XIX° siècle un horloger bijoutier à l’emplacement qu’occupera De Witte qui consistait en une boutique informe, juste en rez de chaussée sans étage.
L’horloger Diericx est le premier occupant du nouveau bâtiment d’angle de style baroque, même si le terme nouveau est peu approprié pour une construction datant du début du XVIII° siècle.
Cette Petite Rue au Beurre, qui donne dans la rue au Beurre laquelle aboutit directement sur Grand Place , sera toujours la rue des horlogers bijoutiers , on remarque la boutique Mornard avec sa grande enseigne Lip . De Witte finira par annexer cette petite boutique à sa gauche mais on aperçoit une horloge publique qui fait office d’enseigne d’un autre horloger . Enfin l’autre côté de la rue comprenait d’autres horlogeries, dont l’angle de rue occupé par les ateliers-boutique De Witte .
une horloge Oméga remplacera celle de Pontiac
Dans les cartouches à fonds bleus, visibles en façade, on peut lire DE GOUDE HUYVE qui donne son nom à cette maison classée Monument Historique. Dès le Moyen Âge, la domonymie était une tradition, à Bruxelles comme dans de nombreuses villes européennes, qui consistait à donner un nom servant à identifier une maison. Celle-ci avait été initialement construite rue de l’Étuve, juste après le bombardement de Bruxelles pendant 48 heures d’affilée par les troupes françaises de Louis XIV en 1695, qui obligera à reconstruire quasiment entièrement Bruxelles. 

Il est impossible de narrer, même brièvement , dans cet article, la guerre de la Ligue d’Augsbourg qui dure neuf ans et comprend de complexes rebondissements,  joyeusement oubliés des cours d’histoire dans l’enseignement secondaire en France. Ce que nous appelons le Grand Siècle est vu comme un siècle noir dans les Pays Bas méridionaux. Vous comprendrez que les Belges en ont un souvenir beaucoup plus vif, cuisant même. L’adjectif me semble approprié pour le bombardement de Bruxelles qui se solde par le pilonnage, l’incendie et la destruction totale du tiers de la ville, dont Grand-Place. Injustifiable en ce que la querelle ne concernait pas Bruxelles mais le roi d’Angleterre, inutile d’un point de vue militaire, puisque n’ayant pas servi à détourner les troupes alliées de la citadelle de Namur comme prévu, le bombardement de Bruxelles contribuera à faire pâlir en Europe le soleil du Roi éponyme. Napoléon Ier jugera, un siècle plus tard, cette action « aussi barbare qu’inutile ». Mais la critique la plus acerbe envers le Maréchal de Villeroy, qui menait les troupes françaises, vient de Manneken-Pis en personne – apparu en 1620, il avait déjà 75 ans de présence – qui se moque de la rage de Louis XIV et se plaint que ce bombardement lui ait enlevé l’envie de pisser: si je voyais brancher Villeroy à quelque arbre, j’en rirais tant que j’en pisserais de nouveau.

La façade de cette petite maison se trouvait rue de l’Étuve jusqu’en 1929. Elle fut démontée et reconstruite contre l’église Saint-Nicolas.

Une voûte de l’Eglise Saint Nicolas, sur laquelle s’adosse l’horlogerie De Witt, conserve  un boulet français, enchâssé depuis 1695 dans une voûte, comme une douloureuse carie dans le beau sourire que les Belges nous consentent quand ils nous accueillent,  tout de même si chaleureusement.  

En conséquence De Witte occupait de ce côté de la Petite Rue au Beurre, deux boutiques contiguës dans des bâtiments distincts, si bien qu’au fil des années et des configuration des aménagements, la maison aura une seule voire deux entrées distinctes. Les temps ont changés, le goût est à l’épure et les publicités ostentatoires et lumineuses des marques de montres et de réveils ont disparues. 

Plan de Bruxelles positionnant la Bijouterie De Witte par rapport à la Bourse à gauche ; au centre droit on trouve Grand Place , la place centrale de Bruxelles mondialement célèbre, et tout en bas la fontaine du Manneken Pis.

                                                                PONTIAC 

Les liens entre Pontiac et Paul De Witte étaient si forts que l’on peut retrouver son nom au cadran des montres Pontiac ; notre article permettra peut être d’éclairer quelques vendeurs intrigués ou ignorants de l’existence de cette maison

Pontiac est une marque d’horlogerie qui a connu un succès particulier chez nos voisins d’outre-Quiévrain, parce que son importateur, le néerlandais Ali Kinsbergen, était propriétaire de la marque en Belgique et aux Pays Bas si bien. Elle a été ressentie comme une marque locale puisque le siège social était à Bruxelles . Néanmoins et contrairement à certaines affirmations, il n’y eut jamais de fabrication de Pontiac à Gand ni en tout autre endroit en Belgique, tout était fabriqué et assemblé en Suisse . Le champion Wim Van Est, premier néerlandais à porter le maillot jaune, a vu sa  renommée s’accroitre selon une courbe inversement proportionnelle à sa chute vertigineuse lors du Tour 1951, surtout grâce au marketing de circonstance de l’horloger. Effectivement Pontiac, qui avait parrainé l’équipe néerlandaise, a lancé une campagne publicitaire en ces termes au nom du champion cycliste et si résistant  « Je suis tombé soixante-dix mètres de haut , mon cœur s’est arrêté, mais ma Pontiac fonctionnait encore ». Une plaque a ensuite été dévoilée sur le site de la chute en 2001 par Wim Van Est devenu septuagénaire.

Cette chute répond étonnement à un défi organisé dans le but de prouver la solidité de la marque Pontiac, seize ans plus tôt. En 1935 Ali Kinsbergen en personne avait jeté une montre Pontiac depuis le toit du « Boerentoren » à Anvers le plus haut building de Belgique – en haut à gauche – , devant des dizaines de journalistes et huissiers de justice. Après l’avoir récupéré cent mètres plus bas, elle s’avère bel et bien intacte et en état de marche. Impressionnant quand on songe que l’incabloc n’existait pas encore . C’est ce qui s’appelle lancer une marque puisque l’événement fait énormément de bruit à l’époque et assure un véritable succès pour la marque. Le slogan « PONTIAC TIC TAC » a été présenté lors de l’ouverture de l’exposition universelle EXPO 58 à Bruxelles où Pontiac décide de prouver la solidité de la marque PONTIAC, par un nouveau lancé de montres: deux montres PONTIAC ont été lancées du haut de la plus haute boule de l’Atomium à Bruxelles, soit 102 mètres de haut. Après l’impact de celles-ci sur le sol, elles étaient encore toutes les deux en état de marche. Visiblement et paradoxalement,  jeter une montre par les fenêtres ne veut pas forcément dire jeter de l’argent par les fenêtres. La toute première publicité télévisée diffusée aux Pays-Bas était pour la marque Pontiac en 1964.

Du fait de ce type de sponsoring, Pontiac devient la montre des sportifs .

Les noms des montres Pontiac en sont le reflet : Maillot jaune , maillot Arc en Ciel , Nageur , Prize Winner , etc 

On ne confondra pas De Witte avec De Witt la prestigieuse marque de montres, même si les origines de ces familles sont toutes deux belges et nobles. Établie en Suisse, la manufacture est fondée en 2003 par le comte Jérôme De Witt, qui au même titre que le Prince Napoléon descend de Jérôme Bonaparte, le plus jeune frère de L’Empereur, mais par les femmes. Nous vous renvoyons à notre article sur Cluses et la place des Napoléonides dans l’histoire de l’horlogerie. 

Né en avril 1950 dans le Périgord, Jérôme de Witt est le fils de Son Altesse Impériale la princesse Marie-Clotilde Bonaparte et du comte Serge de Witt. Pour ceux qui ont le vertige de l’Histoire incarnée, sachez qu’un de ses grand-oncle était Albert, le mari de la reine Victoria et que son autre grand oncle Charles Joseph Bonaparte fonde le FBI en 1908 . En outre la marraine de sa mère était l’Impératrice Eugénie, chez laquelle elle se réfugie, de 1914 à 1919, suite à l’invasion de la Belgique. Pour ces familles régnantes, la grande Histoire se confond avec leurs propres histoires familiales et l’on mesure qu’elles sont bien plus proches chronologiquement que nous ne l’imaginons, puisque par exemple sa mère disparaît en 1996 et son père, né en 1891 à Moscou et chassé de Russie par la Révolution de 1917, ne meurt qu’en 1990, à 99 ans. Son aïeul Jérôme Bonaparte qui avait la passion des montres, permit la création d’une extraordinaire collection dont Jérôme de Witt a hérité en partie, enrichie au cours des siècles par ses différents propriétaires. comme cette extraordinaire montre à tact, ci-dessous.

Montre à tact de Jérôme Bonaparte roi de Westphalie . Collection Fondation Napoléon donation Lapeyre.

Outre une lecture traditionnelle en ouvrant le boîtier, les montres à tact permettent de lire l’heure dans l’obscurité grâce à une flèche placée sur le couvercle et dirigée vers vingt-quatre boutons de touches, douze gros boutons pour les heures et douze petits boutons pour les demi-heures, répartis tout autour de ce cadran: il suffisait de tourner le disque supérieur dans le sens des aiguilles d’une montre jusqu’à un point de blocage, puis de définir l’heure avec la position de la flèche par rapport aux boutons.
Les montres à tact étaient utilisées par les jeunes gens qui désiraient connaître l’heure discrètement et qui, par courtoisie, consultaient leur montre par simple toucher sans la sortir de leur poche, afin de ne pas paraître ennuyés ou impatients, faisant donc preuve d’un tact tactile . 

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L’heure au Japon

Tous les 10 Juin, les Japonais célèbrent dans un temple de la préfecture de Shiga, un festival des horloges, en mémoire de l’introduction de la première clepsydre, une horloge à eau, par Tenji (626-672), le 38° Empereur du Japon, le 25 avril 671. Pourquoi alors placer cette célébration le 10 juin et pas le 25 avril? Parce que ce jour correspond au 10 juin dans le calendrier solaire, donc désigné comme Jour de l’Horloge au Japon en 1920. Le sanctuaire, construit en 1940, a commencé à organiser le festival tous les 10 juin à partir de 1941. Ce décalage de date n’est qu’une des nombreuses différences entre les systèmes occidentaux et extrêmes-orientaux de mesure du temps.Le_Musée_Paul_Dupuy_-_Horloge_japonaise_à_double_foliot_(Wadokei)_-_Période_EdoMusée Paul Dupuy: Deux foliots séparés permettent à cette horloge japonaise du XVIII° siècle de fonctionner à deux vitesses différentes pour indiquer des heures différentes.

Nous allons expliquer le système qui a eu cours au Japon jusqu’en 1873, mais brièvement car celui ci n’a plus cours et surtout qu’il était d’une invraisemblable complexité puisqu’il utilisait des heures inégales: six unités de temps la journée, du lever du soleil au coucher, et six unités de nuit, du coucher du soleil au lever. Donc les heures japonaises variaient avec les saisons puisque les journées sont plus longues en été et plus courtes en hiver. Pour le moins ce n’est déjà pas simple mais, héritage du temps où l’on mesurait le temps avec des bâtons d’encens qui se consumaient en comptant à rebours, le décompte des heures se fait donc lui aussi à l’envers! En conséquence une horloge classique japonaise, ou wadokei, comporte six heures numérotées de 9 à 4, qui s’enchaînent en marche arrière de midi jusqu’à minuit et inversement. Pourquoi 9 à 4 me direz vous? Parce que les numéros 1 à 3 n’étaient pas employés au Japon pour des raisons religieuses, les moines bouddhistes s’en servant pour appeler à la prière et que ce serait surtout bien trop simple à défaut d’être logique, n’est ce pas ? Vous comprendrez que nous faisions l’impasse sur les signes du zodiaque associés aux heures lesquels n’étaient pas les mêmes de jour ou de nuit, évidemment. Pour les horloges qui n’avaient pas de double mécanisme, comme celle du Musée Dupuy ci dessus, existait la solution de cadrans changeant en fonction des saisons

SAKOKU

Dans notre article sur la vallée de Cluses, nous avions insisté sur le fait que la chose à retenir était que l’Italie n’a pas d’existence en tant que telle avant 1860; En revanche, de cet article, il faudra retenir que pour le Japon, le monde extérieur n’a pas existé de 1633 à 1842, sa période isolationniste dite Sakoku, avec les toutes les conséquences les plus étonnantes que cela implique.

tokuwaga-iemitsu-shogun Tokuwaga Iemitsu, le Shogun instaurateur du Sakoku

Effectivement en 1633, le troisième shogun de la dynastie des Tokugawa décide d’isoler totalement l’archipel japonais, se plaçant dans la droite ligne du premier shogun, son grand père, qui avait fini par considérer tout ce qui est étranger comme un danger.chretiens

Sa politique d’isolement commença par l’expulsion ou l’exécution des missionnaires et des chrétiens, puis la limitation des ports ouverts aux étrangers, l’interdiction d’entrer ou sortir du territoire pour tout Japonais sans autorisation sous peine de mort, l’expulsion de tous les étrangers non-autorisés et la destruction des navires capables de naviguer en haute mer. Contrôle strict et limitation drastique du commerce extérieur, ce qui est semble être une folie économique mais représente au moins un rempart contre l’exploitation des ressources minérales japonaises, telles que le cuivre et l’argent par les nations étrangères, mais – effet pervers – aussi contre les découvertes et avancées technologiques du reste du monde.

En 1703, le tremblement de terre de Kanto fait 150.000 morts, l’éruption du mont Fuji quatre ans plus tard provoque d’autres milliers de disparitions, pourtant même ces catastrophes ne mirent pas fin à l’isolationnisme du Japon. Mais étrangement loin de l’affaiblir, le Japon se développe avec un essor considérable alors que le pays est relativement pauvre en ressources naturelles et que l’autarcie relève quasiment de l’utopie. Ainsi à la fin du XVIII°, Edo, future Tokyo, était la plus grande ville du monde avec déjà un million d’habitants et c’est là sa richesse: une prolétariat surabondant, adroit et industrieux.

Il est assez tentant de comparer le Sakoku japonais à l’une ou l’autre des périodes isolationnistes chinoises sous les dynasties Ming puis Quing, époques chinoises à peu près correspondantes. La comparaison vaut pour la fermeture totale de l’Empire du Milieu aux étrangers et à leurs produits. L’Empereur chinois répond, avec suffisance, aux occidentaux qui veulent échanger avec son pays, que celui-ci est auto-suffisant et qu’il n’a nul besoin de commercer avec eux. D’évidence il avait raison, sauf sur un produit devenu capital selon son propre choix: le minerai d’argent. Effectivement en 1571, il impose à ses sujets le paiement de l’impôt non plus en grains, bétail ou corvées mais en argent métal. La Chine a donc subitement besoin, dans des proportions énormes, de ce métal qu’elle ne produit pas suffisamment. Pendant ce temps, les japonais paient leurs impôts en riz.

The Cerro Rico (Rich Hill) and the city of Potosí, in what is now Bolivia; painting by Gaspar Miguel Berrio, 1758 Demande chinoise satisfaite grâce à la découverte en 1545 à Potosi, dans l’ancien Pérou de l’Empire espagnol, d’une mine d’argent d’une qualité sans équivalant et dans des proportions si colossales quelles sont à l’origine des expressions encore usitées de nos jours: c’est le Pérou, en français ou « cela vaut un Potosí », en espagnol. Argent métal que les chinois échangent contre trois marchandises dont ils ont alors l’exclusivité: le thé, la soie et la porcelaine. Les chinois refuseront, toujours poliment mais fermement, l’échange de marchandises contre marchandises, les paiements ne pouvaient se faire qu’en argent métal dont ils ont tant besoin.

Vous remarquerez que ces trois produits de luxe, dont l’Occident aurait parfaitement réussi à se passer, ont fait la fortune de la Chine pendant des siècles. Jusqu’à ce que ses monopoles tombent les uns après les autres: pour le thé suite à l’établissement de plantations dans les colonies anglaises à partir de théiers volés en Chine, pour la porcelaine jusqu’à ce que le secret soit éventé par un jésuite implanté à Jingdezhen, capitale mondiale de cette céramique, encore aujourd’hui, et qu’enfin le mystère de la soie soit dévoilé par des espions et des pillards après trois millénaires d’exclusivité chinoise: à mettre en perspective avec l’appétence actuelle des Chinois pour nos marques de luxe et nos brevets d’invention. L’histoire est décidément bien une roue ou une balance qui se répète ou se plagie , quitte à inverser les rôles.howquaHowqua 1769+1843: ce marchand chinois était à sa mort l’homme le plus riche du monde, à la tête d’une fortune bien plus importante que celle des Rothschild. Il a financé plusieurs grandes familles anglo-américaines, comme les Forbes ou les Roosevelt, et permis le développement du chemin de fer et de l’industrie américaine par ses fonds et investissements colossaux. Howqua était l’un des « treize Hong », les intermédiaires obligés des échanges de l’Empire du Milieu à Canton, seul port chinois ouvert sur le monde. Oh quoi ? De Howqua vous n’en avez jamais entendu parlé ?! C’est simplement parce que les Américains ne vont pas clamer qu’ils doivent une partie de leur expansion à un chinois et que notre vision de l’histoire est aussi européocentrée que celle des chinois était axée sur leur Empire du Milieu. Mais aussi parce que Howqua annonce la fin d’une domination du commerce mondial par la Chine pendant plusieurs siècles. Prépondérance passée d’autant plus inaperçue en Occident, qu’elle était lointaine, dérangeante, insolente et somme toute peu conflictuelle.640px-China_imperialism_cartoon Factuellement les isolationnismes chinois et japonais sont vaincus au XIX° siècle par la force militaire occidentale qui les forcent à commercer, mais les raisons du naufrage économique chinois sont multiples. Une des grandes responsabilités de la Chine dans son déclin se situe dans le domaine de l’échange des idées et des innovations.

Un protectionnisme strict appliqué par la bureaucratie impériale chinoise, idéologiquement soutenu à la fois par les élites, soucieuses de ne pas ébranler les rites d’une société traditionnelle totalement immobiliste et par la population qu’une méfiance extrême, confinant à la xénophobie, maintient à distance l’étranger. Alors en Chine, rien n’y est plus important que la répétition du connu qui puise sa force de conviction dans le respect des ancêtres et dans la certitude qu’ils ont déjà atteint la perfection. Quel besoin, quel intérêt y aurait-il donc à acheter des produits étrangers, donc inconnus, donc extérieurs à la tradition, et ainsi « imparfaits » par essence et non-conformes aux rites, leur utilité fût-elle avérée? Il va s’en dire qu’il en est de même des idées et des innovations techniques. Nous nous devions de décrire brièvement le système chinois, pour comprendre combien le Japon, malgré son propre isolationnisme va marquer sa différence en n’ayant pas aussi vision fermée des choses, grâce au Rangaku qui va lui permettre un miracle économique que la Chine ne connaîtra pas.

RANGAKU 

Dutch_personnel_and_Japanese_women_watching_an_incoming_towed_Dutch_sailing_ship_at_Dejima_by_Kawahara_KeigaArrivée d’un navire hollandais au Japon observée en utilisant un teresukoppu

Bien que les livres étrangers soient formellement interdits au Japon depuis 1640, les règles s’assouplirent au début du XVIII°. Pour être informés des avancées technologiques dans le monde, les japonais mirent en place le Rangaku qui signifie Etudes Hollandaises parce que ce sont par les médecins et commerçants bataves que parviennent les premiers enseignements et livres qui seront traduits en japonais.

Les microscopes – à gauche – , les mœurs des hollandais – à droite –  les montgolfières, etc. n’étaient donc pas inconnus des japonais. Le mouvement du Rangaku admet que  la culture occidentale renforcerait le Japon plutôt que de l’affaiblir. Petit à petit, le Rangaku répand à l’intérieur du pays les innovations contemporaines de l’Occident. L’ère Meiji, 1868 à 1912, est donc une période de bouleversements au cours de laquelle le Japon sort d’un mode de vie quasiment féodal pour devenir l’une des nations les plus évoluées du monde à une vitesse foudroyante. Une transformation profonde et rapide, qui se renouvellera après la défaite de 1945, étonne et déconcerte encore de nos jours, mais qu’il faut bien appréhender pour mieux comprendre le Japon d’aujourd’hui.

tanaka-1On ne peut évoquer l’histoire du Rangaku, de l’horlogerie au Japon et même l’Histoire avec un grand H, de ce pays sans évoquer Tanaka Hisashige 1799+1881: un véritable génie, peut-être le plus grand inventeur du Japon, souvent surnommé le Thomas Edison japonais pour cette raison.

Tout d’abord concepteur de poupées automates complexes dites Karakuri, voir en vidéo, il construit la première locomotive à vapeur, le premier bateau à vapeur et le premier télégraphe du Japon. Mais il est surtout connu comme étant le fondateur de ce qui deviendra le géant de l’électronique la Toshiba Corporation. Sa carrière a traversé une époque cruciale de l’histoire japonaise, puisque c’est au cours de sa vie que le Japon est passé d’un état féodal isolé à une puissance industrielle moderne grâce au Rangaku.

Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-3Tanaka était un génie mécanique polyvalent, étant l’horloger qui a construit l’horloge la plus compliquée jamais fabriquée au Japon, la Myriad Year Clock ,d’une hauteur de 63 cm et d’un poids de 38 kg. Traduit littéralement comme « l’horloge du million d’années », la création de Tanaka est un chef-d’œuvre à six faces en mille parties, qui a été désigné comme un bien culturel majeur, l’équivalant de nos monuments historiques pour le peuple japonais. Les secrets de l’horloge ont été découverts en 2004, lorsqu’elle a été démontée pour construire une réplique exposée à l’Exposition Universelle Japonaise de  2005.replicaFinancée par le gouvernement japonais, la réplique de la Myriad Year Clock – ci-dessus – a pris une équipe de plus de cent spécialistes, y compris des ingénieurs de Seiko qui a même rappelé un horloger à la retraite pour les aider et nécessiter toute une année. Démonter l’horloge pour analyser ses composants et comprendre la mécanique a déjà pris cinq mois. Néanmoins, il ne fut pas possible de copier exactement certaines parties, telles que le ressort qui l’anime, avant la présentation à l’Exposition universelle.ressort Elle se remonte une fois par an car elle est animée par un énorme ressort de 15 cm de diamètre de 3,7 mètres de long pour une épaisseur de 2 mm forgé. Pour le réaliser, ont œuvré des maîtres forgerons spécialisés dans les lames de Katana, pour Takana.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-WadokeiCadran Wadokei . Cette face est animée par le mouvement individuel le plus complexe de l’horloge, vous allez comprendre pourquoi: il indique le jour sur la moitié supérieure du cadran et la nuit sur la moitié inférieure, chaque moitié divisée en six segments qui varient selon les saisons. L’heure est indiquée par un pointeur noir fixé sur la lunette à XII heures, la rotation se faisant dans le sens antihoraire. Mais comme l’heure japonaise traditionnelle est saisonnière, les plaques d’argent avec des chiffres pour les heures se déplacent progressivement tout au long de l’année. Au printemps et en été, les disques indiquant la journée s’écartent et inversement pendant l’hiver, elles se rapprochent. Ainsi au solstice d’été, les plaques diurnes sont les plus éloignées, en revanche les plaques nocturnes sont si proches qu’elles se touchent presque.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-7Cadran des saisons: il affiche les 24 périodes saisonnières de l’année solaire japonaise.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-8Cadran semainier : l’aiguille courte montre les jours de la semaine, tandis que l’aiguille longue indique les heures via un lien vers le cadran wadokei mais cet affichage de l’heure sert ici d’indicateur pour le mécanisme de sonnerie qui sonne les heures.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-9Cadran sexagésimal : Le cycle sexagésimal est un système de numérotation des unités de temps basé sur la combinaison de deux séries de signes: les dix tiges du calendrier lunaire, dites tiges célestes inscrites sur le disque extérieur, et les douze signes du zodiaque chinois, dites branches terrestres indiquées sur le petit disque intérieur, permettant d’obtenir soixante combinaisons différentes.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-10Cadran lunaire: l’anneau extérieur argenté affiche les jours du mois en fonction du mois lunaire, tandis qu’une sphère, au centre, montre les phases de la lune.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-11Cadran occidental : il affiche évidemment le système occidental avec une trotteuse à VI heures, sans que l’on est réussi à déterminer si le mouvement choisi par Takana était suisse ou français. Toutefois c’est le seul grand ressort décrit plus haut qui anime tous ces cadrans.Tanaka-Hisashige-Myriad-Year-Clock-5Au-dessus, sous un dôme de verre se trouve une sphère armillaire, d’un style d’une modernité déroutante pour un objet de 1851. Deux petits globes, représentant le Soleil et la Lune, tournent autour d’une plaque de verre représentant l’archipel nippon avec l’ancienne capitale de Kyoto en son centre, indiquant la position du Soleil et de la Lune par rapport à la Terre en temps réel. L’horloge originale est exposée au Musée national de la Nature et des Sciences de Tokyo, alors que la copie se trouve au Toshiba Science Museum de Kawasaki.

Cette horloge remarquable est emblématique, elle est un très  bel exemple de Rangaku, où sont habilement fusionnés techniques empruntées à l’Occident et génie japonais. En 1873, le Japon passe de l’ancien calendrier lunaire-solaire au calendrier grégorien et du son système à heure saisonnière à notre système à heures fixes et égales. Cet important basculement a suscité une énorme demande de montres de type occidentales.

Trois catalogues communs à Jaz et Seiko

On notera que la date de 1881 correspond à la mort de Tanaka mais aussi à la fondation de Seiko par Kintaro Hattori , marque qui reprend Jaz en 1986.

voirin31- M. VOIRIN          2- M. SATO de Tokyo-Clock            3- M. CARPANO

Les premiers contacts entre Jaz et le Japon se font dans les années 60 par la visite de Sensei SATO de Tokyo-Clock à Wintzenheim…kopfler 26… et par un voyage d’études de cadres de Jaz au Japon (encadré Henry Kopfler)seiko-museum_1Le Musée Seiko à Tokyo occupe deux étages. seiko museumNous consacrerons un article complet, très prochainement, à ce remarquable musée.

 

LA PREMIÈRE HORLOGE MÉCANIQUE AU JAPON

Empereur du JaponAvril 2017: le Roi d’Espagne, l’Empereur, et leurs épouses, montrent un vif intérêt pour une horloge qui avait été offerte par le Roi Felipe III d’Espagne en 1611. Elle a été conçue par un horloger flamand des Flandres, alors provinces espagnoles. Elle sonne les heures et sert aussi de réveille-matin. first clock 1Cette horloge est la plus ancienne horloge mécanique conservée au Japon. Il en existe trois copies dont une à l’ambassade d’Espagne à Tokyo, une deuxième a été offerte au Musée des Cultures à Mexico, la troisième, étant destinée à en montrer le mécanisme intérieur, est conservée avec l’originale.Felipe VI Si Felipe VI et Akihito se sont déplacés jusqu’au temple où est conservé cette horloge, c’est qu’il s’agit de la première horloge mécanique à être arrivé au pays des Samouraïs,  liée à des événements capitaux dans l’histoire de l’archipel que nous allons détailler.Kunozan-Toshogu-Romon-Prayer-hallPour contempler cette pendule, les souverains espagnols et japonais ont donc fait un parcours de 170 km depuis Tokyo jusqu’au temple shintoïste Toshogu à Shizuoka, au sommet verdoyant du mont Kuno, lieu de sépulture originel du premier Shogun de la lignée des Tokugawa. Le parcours de cette horloge est si emblématique qu’il va éclairer tout le reste de notre article.

Mais il faut tout d’abord remonter à la découverte du Japon par les européens, qui intervient cinquante ans après celle de Christophe Colomb des Amériques, en 1492. Effectivement, il faut attendre 1543 pour que des Portugais débarquent au Japon avec armes et bagages. Les Japonais, qui n’avaient pas inventé la poudre mais par leur voisin chinois la connaissaient, découvrent alors les armes à feu et développent très vite une industrie en ce sens et les utilisent allègrement dans leurs guerres civiles.

Malgré une fabrication locale forte au cours du XVI° siècle, le Japon a finalement presque totalement ignoré les armes à feu dans le cadre d’une politique de désarmement forcé, retournant à l’utilisation du sabre, ou Katana, pendant les 250 années qui ont suivi, aidée par la politique d’isolement du Sakoku. Les samouraïs se détournent du fusil, symbole occidental qui remettait en cause l’honneur et les traditions. L’utilisation des armes à feu au Japon ne reprend qu’après 1854, avec la reprise, ou plus exactement le début, des relations avec l’Occident et les conflits incessants de cette période.

Le Japon d’aujourd’hui en a hérité une méfiance salutaire envers les armes de poing qui sont totalement interdites. Pour obtenir un fusil de chasse, il faut suivre un parcours, du non-combattant, en treize étapes contraignantes. Les Japonais estimant, depuis toujours, que les armes, même les sabres traditionnels,  sont à réserver aux policiers et militaires, et encore. Croyant fondamentalement que les armes à feu n’ont pas de rôle à jouer dans la société civile. Si bien qu’on ne compte au Japon que 0,6 arme pour 100 habitants, contre et 14,96 en France et 101,5 aux Etats-Unis. A mettre en perspective avec les taux d’homicides sur l’année 2014,  par exemple: 6 personnes ont été tuées par armes à feu au Japon, contre 138 en France et 33.599 aux USA… démontrant que le degré de violence d’une société est en corrélation directe avec le nombre d’armes en circulation. Bel exemple de la singularité du Japon et de la force du Sakoku, de la part d’un peuple qui a pourtant fait preuve d’une très grande violence lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Dans leurs sillages les Portugais apportent une arme bien plus redoutable que les fusils à silex: les missionnaires jésuites! Effectivement,  six ans plus tard, les Jésuites, avec à leur tête un de leurs fondateurs, Saint François Xavier, installent leurs premières missions. On croit qu’il a offert une horloge mécanique occidentale, en 1551, à un noble, Ōuchi Yoshitaka, mais elle a disparue.De Liefde parcoursMais les Jésuites, qui convertissent assez rapidement des milliers de Japonais, sont avant tout des Portugais. Lorsqu’en 1600 un navire nommé De Liefde, dernier rescapé d’une flottille de cinq vaisseaux hollandais en route pour les Indes par la voie de l’Ouest, s’échoue sur une île japonaise: les membres de la Compagnie de Jésus conseillent aux japonais, en toute charité et solidarité entre occidentaux, de faire une croix dessus. En clair: crucifier les survivants, suggérant qu’ils sont probablement des pirates. château d'OsakaLes Japonais ne se laissent pas manipuler, mais restent méfiants: le navire est saisi , son équipage est emprisonné au château d’Osaka. Ironie et pragmatisme japonais: les soins de l’équipage du Liefde et le rétablissement de leur santé revient aux Jésuites et les prêtres font également office d’interprètes pour les Japonais.Statue-Tokugawa-Ieyasu-Tosho-Shrine-Japan-NikkoL’ordre vient de Ieyasu Tokugawa, l’un des personnages centraux de l’histoire du Japon qu’il unifie à son seul profit. En 1603,  il devient le premier Shogun de la dynastie des Tokugawa qui régnera jusqu’en 1867. Les shoguns étaient des dictateurs militaires qui exerçaient le pouvoir effectif, l’Empereur, ou Mikado, n’étant que le gardien des traditions. Il fait du village de Edo , où il avait établi ses quartiers généraux, la nouvelle capitale qui prendra le nom de Tokyo à partir de l’Ère Meiji. A bord de ce navire se trouve le premier britannique à fouler le sol japonais, William Adams qui aura un destin absolument extraordinaire au pays des chrysanthèmes, après avoir été corsaire aux côtés du fameux Francis Drake, lequel sera commandant en second de la flotte anglaise qui affronte l’Invincible Armada espagnole en 1588. Célèbre bataille navale où William Adams commande un navire sous la conduite de Drake, épisode de sa vie qu’il cachera aux hispaniques qu’il croise, évidemment.

Portraits de William Adams par des artistes japonais

Willam Adams rencontre Ieyasu à Osaka trois fois, entre mai et juin 1600, qui l’interroge sur ses connaissances en navires et construction navale. Ses notions en sciences plaisent à Ieyasu, qui continue cependant à emprisonner Adams et les autres marins, ses soupçons n’étant pas apaisés. En attendant, il profite de l’aubaine puisque le navire de 400 tonnes, embarquait 26 canons, 550 arquebuses, 5.000 boulets de canon et 5.000 livres de poudre à canon,  qu’il utilise lors de la bataille de Sekigahara, événement majeur dans l’histoire du Japon qui lui permet de prendre le pouvoir absolu trois ans plus tard.

Statue de William Adams au Japon et gravure XIX°: le Shogun sur le chantier naval

Ieyasu finit par le libérer. Il fait également restituer les biens volés sur le navire et ajoute une forte somme à titre de compensation. Il leur interdit cependant de quitter le Japon et leur enjoint de rejoindre la capitale Edo, où Adams utilise la majeure partie de l’argent qui leur a été donné dans des tentatives infructueuses de corruption des proches d’Ieyasu dans le but d’obtenir l’autorisation de quitter le Japon. En 1604, Ieyasu ordonne à Adams et à ses compagnons de construire un navire de style occidental. Après qu’un premier vaisseau de 80 tonneaux a été construit pour explorer les côtes du Japon, le Shogun ordonne la construction d’un navire de 120 tonneaux pour commercer au loin, le San Buena Ventura.

La fameuse série SHOGUN, tournée au Japon dans les années 80, rediffusée par Arte en 2010, était très inspirée par la vie William Adams, interprété par Richard Chamberlain.

L’histoire est effectivement romanesque puisque le Shogun prend Adams en affection, fait de lui un diplomate et conseiller commercial révéré. Il devient son conseiller personnel pour les choses concernant l’occident, apprend si bien le japonais qu’il remplace le Jésuite qui faisait office d’interprète officiel.

william adams navigator Pour finir, le Shogun lui accorde de grands privilèges jusqu’à en faire un samouraï, le dotant d’importants revenus et d’un grand domaine. Revers de la pièce, il doit rester au Japon refaire sa vie avec une japonaise et oublier la famille Adams, restée dans la méphitique capitale anglaise. Son souvenir reste vif au Japon, où statues et monuments l’honorent.                                                                                                                                                                                                                                                  Japan/ Britain: The first Englishman to visit Japan, navigator William Adams, meets Shogun Tokugawa Ieyasu in 1600 CE.En 1609, c’est un galion espagnol, le San Francisco, qui s’échoue à son tour sur l’archipel nippon. Un typhon avait emporté le navire au large du Japon, mais des pêcheurs et paysans japonais purent sauver une majorité des marins espagnols et le commandant du navire, Rodrigo de Vivero, ancien gouverneur intérim des Philippines, qui rentrait de Manille à Acapulco. Nous l’avons vu plus haut les étrangers ne pouvant accoster en Chine, c’est à Manille que les Espagnols livraient l’argent de l’Empire espagnol des Amériques et récupéraient en échange la soie, de la porcelaine, de l’or et des épices. Les 317 survivants sont chaleureusement reçus par les japonais. Le capitaine Don Rodrigo resta au Japon pendant une année et s’accoutuma à la civilisation japonaise, puis le shogun lui offrit le deuxième navire construit par William Adams pour rentrer au Mexique et reçoit un prêt de 4000 ducats du Shogun. Il est accompagné par 23 japonais, dirigé par le marchand Shōsuke Tanaka, ils sont les premiers nippons à effectuer une traversée du Pacifique et à accoster sur le continent américain.

LuisdeVelascoII Luis de Velasco y Castilla, vice-roi de Nouvelle-Espagne, reçoit les 23 japonais et exprime sa grande satisfaction devant le traitement reçu par les marins espagnols au Japon. Le vice-roi cependant confisque le San Buena Ventura, craignant que les Japonais ne parviennent à maîtriser l’art de la navigation transocéanique.

Néanmoins en 1610 , il décide d’envoyer une ambassade au Japon en la personne du célèbre explorateur Sebastián Vizcaíno qui part avec le remboursement du prêt du Shogun, ramène les Japonais – moins trois qui ont voulu rester – et la fameuse horloge en cadeau et preuve de l’avancée technologique espagnole.

Vizcaíno, ayant perdu son navire, rentre du Japon le 28 octobre 1613 sur le galion japonais San Juan Bautista réplique Réplique du San Juan Bautista, à Ishinomaki

Vizcaíno, ayant perdu son navire, rentre du Japon seulement en  sur le galion japonais San Juan Bautista et arrive à Acapulco en . Hasekura_in_Rome (1)Il est accompagné de Tsunenaga Hasekura, nommé ambassadeur du Japon et de quelque 140 autres japonais. Il fut le tout premier officiel japonais envoyé aux Amériques, et lorsqu’il se rendit en France, permit le premier contact direct connu entre Français et Japonais à Saint-Tropez. Il était en route pour Rome où il rencontre le pape Paul V en novembre 1615 puis passe en Espagne. Il s’était converti au catholicisme.

On le constate à l’aune de ces événements: le premier Shogun accusé de xénophobie primaire, avait largement fait démonstration de l’inverse allant jusqu’à mettre un gaijin au plus haut poste de son pays, prêtant bateaux et argent avec générosité, envoyant des ambassades, gardant l’horloge offerte près de son tombeau, laissant les missionnaires s’installer à sa cour et convertir ses sujets. Il était difficile en fait, si l’on compare avec les autres souverains de cette époque de trouver plus ouvert: alors que se passe t-il pour que les shoguns reculent au point de s’isoler totalement?

invasion espagnoleEn fait les Japonais finissent par revenir des voyages et des ambassades, même les trois qui avaient d’abord décidé de rester, et ils racontent ce qu’ils ont vu: l’horreur et la puissance de la colonisation espagnole aux Amériques qui a pour préambule la conversion des indiens, puis leur assimilation forcée ou leur extinction. La réaction des Japonais est donc tout à fait rationnelle, c’est par prudence qu’ils se protègent en s’enfermant. Les Chinois brident leurs relations étrangères par orgueil, les Japonais par peur. Cette peur a peut-être été saine, prudente et salutaire face à un tel danger potentiel.train de hiroshigeCette différence a des conséquences pratiques et psychologiques importantes: la suffisance chinoise va les figer parce qu’ils pensent qu’il n’y a rien de bon ailleurs, le pragmatisme japonais lui permet d’apprécier, comprendre et adapter le savoir du monde à la sauce japonaise,tout en se préservant de l’étranger.The_ReceptionLes Chinois acceptaient les ambassades étrangères sur un malentendu: l’idée d’une diplomatie d’égal à égal n’avait aucun sens pour eux. Ils savaient que les britanniques étaient 8 millions, quand ils étaient 133 millions et quand on leur offrit un globe terrestre, ils ne s’étonnèrent pas de la rotondité de la mappemonde, mais que la Chine y  apparaisse si petite! Pour eux, les ambassades et leurs cadeaux étaient interprétées comme des signes d’allégeance des autres souverains. De ce fait, et malgré le sac du Palais d’Eté en 1860 qui en a récupéré beaucoup,  le musée de la Citée Interdite regorge encore d’extraordinaires horloges occidentales offertes en cadeaux et côtoient des horloges chinoises, de la fin du XIX°, issues des ateliers impériaux d’une luxuriance extravagante parce qu’uniquement destinées à la famille régnante. Rien de cela dans les musées japonais, avant le XIX°, puisque même les ambassades sont exclus pendant le Sakoku. Le musée Seiko présente des horloges japonaises mécaniques d’une assez grande sobriété comparée à l’exubérance chinoise.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

réveil JAZ Swiss Made sans bélière circa 1940 /1942 hors catalogue

swiss made (1)Réveil mécanique , hors catalogue peut être destiné à l’export , Swiss Made , mouvement mécanique , calibre Z , pas de bélière , aiguilles et chiffres lumineux , arrêt de sonnerie au sommet diamètre 9,5 cm . Photos courtoisies du collectionneur Serge Benatti .

Ce type d’aiguilles et ce genre de pieds n’ont jamais été employés par Jaz pour d’autres réveils; ce réveil est à rapprocher de sa version avec bélière . swiss made (2)swiss made (3)swiss made (4)calibre Z (2)Le calibre Z est identique à celui du modèle à bélière,  sauf l’inscription portée en bas et non sur le côté calibre Z (3)calibre Z (4)calibre Z (1)

DRILIC et DARCIC contrefaçons soviétiques par SLAVA

DRILIC  conçu par le célèbre designer Philippe Charbonneau pour Jaz , en 1964.Slava Drilic Urss (1)Variante A du DRILIC avec des chiffres inspirés de celui du VONIC ( voir ci-dessous) par le russe SLAVA ( indiqué en caractère cyrillique , comme la mention fabriqué en URSS ) vonic 6 VONIC par Jaz Slava chiffres romainsVariante B du DRILIC à chiffres romains très étirés , étrangement ressemblants à ceux du CHANIC ( voir ci-dessous) chanic non jazistorCHANIC par Jaz CREATOR: gd-jpeg v1.0 (using IJG JPEG v62), quality = 75Variante C à cadran faux bois . On notera qu’aucun de ces réveils russes n’est lumineux .

 

Si la ressemblance entre les SLAVA  à gauche , et les JAZ , à droite , n’est pas évidente de face au premier regard , de dos en revanche la similitude est totale et criante .Drilic dessous Slavadessous ..Slava Drilic dessus.. et dessus , ne présentent aucunes différences avec ceux du DRILIC .Drilic Urss copie Slava (1) Le mécanisme ressemble d’ailleurs beaucoup au calibre AR de Jaz ;

Le DARCIC, à gauche, a fait l’objet d’une imitation plus divergente par SLAVA puisque le cadran est bien différent et le calibre n’était pas inspiré par Jaz .                                      Nous avons précédemment rédigé un article sur le yougoslave INSA qui fabriquait des réveils Jaz sous licence  , comme le DUPLIC , lorsque des accords ont été enfin conclus avec la France qui demandait le remboursement des entreprises hexagonales , spoliées par le nouveau régime socialiste de Tito , en préalable à tout échanges commerciaux . L’économie yougoslave qui était basée sur une forme d’autogestion et non pas d’étatisation comme l’Urss , importait et exportait avec l’Ouest .                                                                                                                                                                              sovietEn revanche l’URSS se voulait autosuffisante dans tous les domaines , elle commerçait peu par rapport à sa force économique . La diffusion des réveils Jaz en Urss n’était donc pas nécessaire et n’aurait pu avoir lieu qu’à travers un transfert de technologie et une fabrication locale en raison de l’inconvertibilité des roubles et du faible pouvoir d’achat des citoyens soviétiques .

Idéologiquement se posait un problème : les droits de propriété industrielle n’étaient pas reconnus par la doxa communiste soviétique . Un décret pris en 1918 établit que tous les travaux scientifiques , mais aussi littéraires , musicaux et artistiques relèvent d’office du monopole de l’État . En outre, certaines découvertes comme les composés chimiques et les médicaments sont écartées du domaine brevetable étant donné que l’URSS ne reconnaît que la brevetabilité des procédés et non celle des produits . Cette loi interdit également aux inventeurs soviétiques de breveter leurs inventions à l’étranger … et inversement , évidemment ! Par voie de conséquence, jusqu’à la fin des années 1950 , la stratégie de l’URSS pour soutenir son développement scientifique et technique se
limite à deux moyens principaux : soit développer elle-même et de façon indépendante sa propre technologie, soit copier la technologie étrangère sans l’autorisation de ses inventeurs et assurément sans leur payer de droits : l’idéologie a bon dos . Au début des années 1960 , il paraît cependant évident que copier les inventions étrangères n’est nullement efficace étant donné que les ingénieurs soviétiques n’acquièrent pas le savoir-faire nécessaire pour l’utilisation optimale de ces technologies . Une telle stratégie se révèle également trop coûteuse en temps et en argent . Drilic diversC’est au moment de ce tournant idéologique et stratégique , dans les sixties débutantes , que sont fabriqués ces réveils , pseudos DRILIC aux accents russes , qui  font l’impasse sur ce que les originaux ont de plus remarquables : le fameux cadran et les aiguilles cunéiforme du designer français Charbonneau . L’URSS était un contrefacteur aussi important que la Chine , voire plus , néanmoins ses réseaux d’exportation dans certains domaines , comme l’horlogerie , étant proches du néant et ses frontières si étanches que Jaz n’a certainement jamais été informé de ces contrefaçons à la petite semaine .

 

L’INDUSTRIE HORLOGÈRE SOVIÉTIQUE

DueberHampdenWatchFactories_pccsSur ordre direct de Staline , l’unique société d’import /export soviétique Amtorg , fait l’acquisition en 1929 , des machines-outils de deux sociétés américaines en faillite , la Ansonia Clock Company of Brooklyn et surtout la Dueber-Hampden Watch Company , qui transitent dans 28 wagons de marchandises . Une vingtaine de techniciens américains font partie du voyage pour démarrer la production de montres par  la First Moscow Watch Factory . En 1930 , la  » Second State Watch Factory » est construite . Cette nouvelle structure se charge de la production d’horloges murales , de réveils .
mayak-horloge-sovietique-cccpRéveil design par MАЯК / MAYAK qui signifie « phare », une autre entreprise  horlogère soviétique, fondée en 1943 et spécialisée en production de masse d’objets divers dont des réveils . JLC et MolnijaSi quelques mouvements étaient copiés sans vergogne , l’Urss était toutefois largement auto-suffisante en matière de production horlogère avec des marques tout à fait indigènes , bien connues des collectionneurs de montres comme Pobeda / Victoire ou Raketa / Fusée en hommage au premier cosmonaute , Youri Gagarine .

Deux réveils SLAVA dit Spoutnik

EXEMPLES de PROPRIÉTÉS INDUSTRIELLES EST /OUEST

S’agissant du domaine le plus documenté , du fait le guerre froide et sa visibilité , c’est dans le domaine de l’aviation et des armements que nous allons chercher les différents exemples de rapports à la propriété industrielle entre l’Urss et l’Occident parfois plus complexes qu’il n’y paraît de premier abord .                        tu 144 vs concordeVOL de PLANS et APPORT SOVIETIQUE : Il suffit de comparer visuellement le Tupolev Tu -144 avec le Concorde pour être convaincu de la fraude , au point qu’il sera surnommé le Concordski . Mais plus factuels sont l’arrestation et l’expulsion de Sergei Pavlov pour avoir découvert dans ses bureaux de l’Aeroflot à Paris , les plans du Concorde en 1965 .                  PS 84 vs DC3ACHAT de LICENCE et APPORT SOVIETIQUE  : à gauche , le russe PS-84 issu du fameux Douglas DC-3 , à travers des achats officiels de plusieurs avions aux Usa et d’une licence de production en URSS . Néanmoins , ce n’est pas une copie totale puisque moteurs et hélices sont de conceptions soviétiques .TU 44CLONAGE ILLEGAL et APPORT SOVIETIQUE : à gauche , le Tupolev T-4 et , à droite , sa matrice involontaire le B-29 Superforteress . Forcés d’atterrir en Mandchourie en 1944 , quatre bombardiers B-29 et leurs équipages sont capturés par les soviétiques qui ne sont pas encore en guerre contre le Japon . En prévision de cette guerre imminente , Staline a multiplié les demandes d’achats de cet énorme bombardier , se voyant opposer un refus poli , mais ferme , des USA . Staline ordonne donc de les copier  » aucun changement ne doit avoir lieu » précise t il , hormis l’apport de moteurs russes plus puissants .chars russesCOPIE INTEGRALE et LEGALE : char russe BT-2 K et son modèle le char américain М.1931 , développé par John Walter Christie . Il serait pourtant erroné de n’en faire qu’une copie en raison de la volonté de l’inventeur de vendre ses chars et tous les plans et documents officiels nécessaires aux Soviétiques . Il a même exprimé le souhait de venir travailler en URSS , mais meurt ruiné en 1944 . Nous devons à la vérité de rappeler que les plans du  modèle précédent , le Christie M1928 , avaient été subtilisés par la Guépéou

Enfin l’exemple le plus connu des paradoxes de l’Union Soviétique en matière de brevets et de contrefaçons est l’homme le plus décoré de l’URSS  Mikhaïl Kalachnikov . Inventeur du célèbre fusil AK 47 , qui porte son nom et de cent-cinquante autres armes , ayant déposé 35 brevets d’invention . La propriété intellectuelle étant collective en droit soviétique , le succès mondiale de l’invention n’a pas fait la richesse de son créateur , qui a gardé des revenus bien modestes . Mais quand Imach , l’usine officielle russe,  fabrique 100.000 fusils d’assaut , 900.000 contrefaçons arrivent dans le même temps sur le marché . À l’origine de cette contrefaçon , les licences de fabrication abondamment données par l’URSS aux pays communistes pendant la guerre froide . Après la chute de l’URSS en 1991 , ces pays ont continué à en fabriquer  « C’est un problème majeur pour nous… La fabrication de fausses Kalachnikov en Bulgarie, en Chine, en Pologne ou aux États-Unis . C’est contraire à la loi internationale » affirme , sans rire , le directeur de l’usine Ijmach , dans le rôle de l’arroseur arrosé .

LA DÉNOMINATION JAZ en URSS

la musique sur les côtesDeux exemples de  » musique sur les côtes  »                                                                                   Les dictatures , de droite ou de gauche , ont des haines communes envers les minorités sexuelles , religieuses ou raciales mais également envers les tendances artistiques non académiques . Comme l’occupant nazi qui avait contraint la Compagnie Industrielle de Mécanique Horlogère , à une ruse sémantique avec l’adoption du jaseur boréal , pour faire oublier que son nom Jaz , était en rapport direct avec le Jazz américain .

1327329163_22Le gouvernement soviétique n’aurait pas admis qu’une marque étrangère fasse référence à quoi que ce soit d’américain sur son territoire . En cas d’importation , bien improbable , Jaz aurait été obligé de changer de nom . La plupart des enregistrements musicaux étrangers étaient interdits en URSS  et étaient dénigrés comme « impérialistes ». En témoigne cette expression fameuse à l’époque : « Aujourd’hui il joue du jazz, demain, il trahit la patrie » . Le parti au pouvoir ne souhaitait pas que ses citoyens écoutent du rock-and-roll , du jazz ou d’autres styles incitant à la quête de liberté . Les nouveaux tubes des Beatles ne pouvaient donc être obtenus que sur le marché noir à des prix faramineux . Étant donné que la demande était très élevée , les trafiquants  avaient une ingénieuse manière de la satisfaire : « imprimer » les chansons sur des radios médicales fournies par les hôpitaux . Il s’agissait essentiellement de radiographies de poumons , représentant un thorax d’homme , d’où l’appellation de « musique sur les côtes »bien connue des soviétiques .

 

Jaz en Belgique

horlogerie belge largePhoto sépia 9 x 4,5 cm ; L’HORLOGERIE SUISSE : le nom du propriétaire , en blouse blanche , se trouve en travers sur la porte vitrée ;  juste derrière sa tête , on peut lire V ou W DECOSTER  FESINETS . Hélas le patronyme Decoster , qui signifie sacristain , étant extrêmement répandu en Belgique , nous n’avons pu localiser cette petite horlogerie.                                                                                                                                                         Le plus étonnant reste ce store banne publicitaire dont nous ne connaissons aucun autre exemplaire ; en revanche le slogan est bien connu : JAZ le réveil de précision ; L’ensemble de ces éléments permet de dater cette photo entre 1921 et 1925 .détail belgeVitrine détail :  A la plaque émaillée est très en biais , néanmoins on arrive tout de même à l’identifier B collées sur la vitrine deux plaques rectangulaires C un des surmontoirs en forme d’éventail posé sur un réveil Jaz , il y en a une bonne dizaine sur cette étagère et d’autres sur l’étagère du haut .Carte postale Moerbeke-Waas , Oppertstraat .

INSA horlogerie Made in Yougoslavia et son DUPLIC

duplic insa (1)Réveil par INSA d’après le DUPLIC de Jaz . Il existe plusieurs variantes de cadran .Insa rouge (1)variante par Insa , made in Yougoslavia  

les trois DUPLIC par Jaz insa grenat (3)duplic-boc3aete-dosla comparaison des dos , laisse comprendre que les mouvement sont identiques ou très proches

 Variantes de cadran pour INSA 

Version à chiffres romains sur écoinçons noirs Processed By eBay with ImageMagick, z1.1.0. ||B2Ces chiffres épais n’apparaissent sur les Jaz que dans les années 70 , preuve que ce modèle a été produit sur plusieurs décennies .

 

catalogue INSALe DUPLIC de INSA apparaît à l’extrême gauche en haut de ce petit dépliant , non daté . On reconnait ,  tout de suite à sa droite,  un grand réveil en pollopas fabriqué sous licence en Yougoslavie d’après un célèbre modèle de Japy qui sert aussi de bases aux premiers réveils animés de la marque de Beaucourt .

à gauche la version INSA , à droite la version Japy

Le Maréchal Tito, président à vie , disait de son pays , non sans cynisme :  » La Yougoslavie a six républiques , cinq nations , quatre langues , trois religions , deux alphabets et un seul parti » . Il aurait pu ajouter …et une usine d’ horlogerie

INSA a été fondé le 17 Août 1950 , sous le nom de  » FABRIKA SATOVA » , littéralement « usines d’horloges » , avec son siège à Zemun , près de Belgrade , capitale de la Serbie et de l’ex-Yougoslavie .                                                                                                                                                                                                                                                          En 1952 , environ 40 000 réveils ont été produits .                                                                             En 1954 , cette société est rebaptisée industrie horlogère « INSA »                                                En 1955, environ 15 000 réveils et environ 9 000 temporisateurs de cage                                                   d’escaliers  ont été exportés. Insa 1959Sur ce document de 1959 , on reconnaît un DUPLIC , estampillé INSA , mais plus proche du DUPLIC que ceux vus plus hauts , avec son cadran grenat et des aiguilles semblables au Jaz . En bas du document les temporisateurs de cages d’escaliers , une branche importante de cette entreprise Yougoslave .

Une autre des grandes spécialités d’INSA sera , durant près de 40 ans , les compteurs d’échec ; à droite le célèbre champion yougoslave Nikola Karaklajić , Maître international et par ailleurs disc-jockey de radio et journaliste musical jouant devant un INSA .

insa-zemun-yugoslavia collectionPetite collection de réveil Insa , avec à l’arrière plan : le Japy à gauche et le Jaz à droite .

Le PEINTRIC par INSA et à droite la version de Jaz produite de 1972 à 1981 .

Quasiment identique mais rappelons qu’il s’agit en fait d’une production de PETER Uhren

Grande horloge INSA , rue Prince Michel ou Ulica Knez Mihailova à Belgrade dans les années 80 . De nos jours la rue du Prince Michel est considérée comme l’une des plus belles rues piétonnes de l’Europe de l’Est où s’affichent toutes les grandes marques mondiales , de ce fait et en raison de sa grande visibilité l’horloge Insa reste un des points de rendez vous privilégiés des belgradois et un symbole de la ville .Memorial Banja luskaMemorial-3à Banja-Luska en Bosnie,  en guise de monument commémoratif du séisme de 1969, les autorités ont conservé une horloge tombée en panne, à l’heure pile de la plus grosse secousse. A été ajouté la date fatidique sur le cadran et elle repose sur un pied spécifique, dont la forme brisée évoque irrésistiblement une faille sismique.

Au début des années 1980 , l’économie yougoslave est mal en point , depuis la mort de Tito , une situation accentuée par la sortie du modèle communiste . Heureusement l’entreprise avait déjà d’autres branches d’activité , comme les compteurs d’eau , qui lui permettent d’ailleurs de se développer de nos jours avec ce modèle à affichage déporté comme nos compteurs Linky . à droite un mécanisme retardateur pour tête de fusée d’obus de mortier , qui n’a rien pour étonner puisque , dès 1953 , Lip et jaz se sont partagés un immense marché de 5 milliards de Francs pour fournir l’armée américaine en mécanismes de fusées d’obus , tout à fait similaires .

Néanmoins en 1990 , l’INSA était devenue l’un des principaux horlogers en Europe avec une production annuelle de 1.200.000 réveils par an dont la moitié pour le marché allemand , dont ses propres créations créations et même des montres assemblées en Yougoslavie

La période de 1991 à 2000 a été marquée par des difficultés exceptionnellement importantes causées par le blocus économique international décrété par l’Onu , contre la Serbie . Depuis la levée des sanctions, des efforts importants ont été déployés pour relancer la production et augmenter les ventes mais de nos jours la production de réveils est retombé à 10.000 réveils . insa 2020 (2)Productions récentes de réveils Insa insa 2020 (3)insa 2020 (1)

Boîtes vertes aux lutins Grande Bretagne circa 1929 /1937

boîte cubic rouge gbBoîte rectangulaire pour Jaz CUBIC  en écrin chapelle                                                                                                                                                                                               Avant guerre , les réveils Jaz , vendus en Angleterre , étaient livrés dans des boîtes spécifiques au Royaume Uni , tant par leur couleur verte , que par leur décor . Le décor est animé par deux personnages qui n’appartiennent qu’aux folklores  britanniques . Ces deux lutins sont probablement des brownies  (ou broonies ) que JK Rowling a repris en elfes de maisons dans Harry Potter , dont le fameux Dobby de la famille Malefoy . Génies domestiques sympathiques et travailleurs , les brownies effectuent les tâches ménagères des familles en échange d’un repas ou de la liberté de se balancer sur un fer à cheval accroché à côté de la cheminée . Dans certains contes , les lutins avancent les aiguilles des horloges et des montres pour faire paraître moins longues les souffrances des malades .

The New Haven Clock Company du Connecticut avait même nommé BROWNIE certains de ses modèles , dès 1919 .le lutin des pendulesLes Trois Petits Lutins de Mireille et Jean Nohain 1936 , à écouter ou découvrir :      https://www.youtube.com/watch?v=wuZMXa5lznQ                                                                                                                                                                                                                  C’est fou c’est fou comme le temps passe vite
Suivant mon goût et mon humeur
Vous êtes en retard ou vous êtes à l’heure
J’couche dans l’horloge du vestibule
C’est moi qui suis le lutin des pendules

Les brownies ont été immortalisés par l’illustrateur canadien  Palmer Cox , dont la plaque tombale est ornée d’un de ces petits lutins issus du folklore écossais , qui ont donné leurs noms à l’un des premiers appareils photos populaires : l’Eastman Kodak Brownie et aux gâteaux au chocolat fondant inventés par le chef cuisinier du Palmer House , un bel hôtel de Chicago . Cette homonymie fortuite et fausse , puisque Palmer est son prénom , a fait croire que ce célèbre établissement , classé monument historique de Chicago , lui appartenait : il n’en est rien ! La philanthrope et féministe Bertha Palmer , millionnaire d’origine française , était la propriétaire des lieux et initiatrice de ces fameux gâteaux . boîte anglaise verte (4)Boîte carrée pour MODIC .boîte anglaise verte (6)Sur les côtés , on retrouve un personnage qui nous est familier depuis notre article sur les publicités anglaises d’avant guerre .

En effet , sur ces publicités pour Butcher , de 1929 et 1931 , apparaît déjà ce personnage de groom filiforme à main droite géante sur un réveil . Là encore il s’agit d’une spécificité anglaise dont nous ne saisissons pas , en revanche , la véritable signification . boîte anglaise verte (1)Une étiquette , d’un vert un peu plus foncé ,  a été apposée pour donner le nom du modèle et , comme en France , un cartouche rond vierge est prévu pour apporter des précisons supplémentaires dont le prix en général : le M rouge est peut être un code prix qui évite de corriger la boîte au fur et à mesure de l’inflation galopante avant guerre  ; En l’espèce on lit au crayon Chrome Lum pour un réveil chromé et lumineux , évidemment .boîte cubic rouge gb 2Jaz for the housewife : Jaz pour la ménagère ( littéralement femme au foyer ) Utilisez le – pour minuter le temps de cuisson – éviter les gâteaux brûlés ,  plats trop cuits , etc . pour envoyer les enfants à l’école – pour vous donner l’heure exacte Pour l’homme d’affaires utilisez le- pour se réveiller à temps le matin . Pour éviter la ruée matinale . Au bureau : utilisez le -pour se présenter aux rendez-vous à l’heure . Toujours ( il) vous donnera l’heure exacteScan2VERSO : la boîte contenait un certificat de garantie , non complété du nom du modèle , qui prenait le fond de la boîte . Elle n’est pas la traduction d’une notice française mais elle est absolument spécifique au marché anglais . Format 11,5 x 10 cm .                                                                                                                                                                          Traduction : le mouvement de cette horloge Jaz …………….Modèle est inconditionnellement garanti pour une année entière . Au delà de cette période rapportez une fois par an , au minimum , à votre revendeur Jaz pour être nettoyé et re-huilé . Si vous lui portez l’attention nécessaire , cette horloge vous assurera de très nombreuses années de service fidèle . Après la première année , la Garantie  couvre toutes réparations nécessaires contre les vices de matières ou de fabrication ; Vendu par …. le ….scan 3RECTO . Traduction : L’entretien de votre réveil .  La roue du balancier de cette horloge tourne , ou tique , approximativement 300 fois par minutes , 432.000 fois chaque jour , 157.680.000 par fois chaque année , et parcourt une distance de 3.186 miles chaque année  (NDLR : 5126 km ) . Donnez sa chance à votre horloge  , ne négligez pas une goutte d’huile tous les deux millions de tours ; La goutte d’huile employée dans un réveil est si petite qu’elle ne peut pas durer plus de deux ans . Une horloge peut tourner des mois et possiblement des années après que l’huile a été asséchée , mais des éléments en seront abîmés . Pour cette raison votre réveil doit être périodiquement révisé , nettoyé et séché , l’huile remplacée et les pièces nettoyées . Grands réveils tous les deux ans . Petits réveils chaque 18 mois .  Si vous faîtes cela votre horloge vous donnera des années de bons services .

Outre les brownies , des lutins sont fréquemment représentés dans les pays anglo-saxons pour les cartes de Nouvel An auprès d’horloges ; en revanche nous n’avons trouvé aucun exemple en France .

Pourquoi parle t-on de vert anglais ? Le vert serait plutôt irlandais , à priori , comme le sont ses deux symboles : le petit Leprechaun tout de vert vêtu et le shamrock , le trèfle symbole de l’île d’émeraude , qui est le surnom de l’Irlande .

Tout le monde sait que pour la Saint Patrick, le 17 mars , tout le Royaume Uni  , les bars irlandais et leurs clients se parent de vert , partout dans le monde .

En Angleterre , dès le  XVIIe siècle , celui qu’appelle « Old Father Christmas », « Sir Christmas » ou « Lord Christmas » porte une longue cape à capuche verte , une couronne de fleurs , de lierre ou de gui parce qu’il symbolise plus l’arrivée prochaine du printemps que l’hiver , plus tard c’est essentiellement Coca Cola qui le fera rougir . Bentley verte de Denis RaquinLa livrée d’une belle anglaise se doit d’être verte . Ci-dessus Bentley Turbo R , collection personnelle Denis Raquin . Le British Racing Green (littéralement « vert britannique de course » en anglais), abrégé en BRG, est la livrée nationale utilisée par les automobiles de course britanniques en compétition internationale .

chambre des CommunesLes symboles de la culture anglaise se parent de vert , à l’instar des Chesterfield ou du cuir de la House of Commonsgazon..et du gazon , institution anglaise s’il en est , of course !

Quand on vous dit qu’une anglaise se doit d’être toute de vert vêtue …jusqu’à la broche d’émeraudes de la reine Mary , sa grand mère paternelle . La Reine Elisabeth II rédige sa correspondance privée à l’encre verte . Mais le vert est déjà appliqué en Angleterre médiévale sous la dynastie des Plantagenêt dans les plus importantes salles du palais de Westminster. Le roi Henri III en fait la couleur principale de sa chambre particulière appelée the painted chamber , des ornements de son lit ainsi que de la chapelle St. Stephen . Balthasar de Monconys, un diplomate français du XVII° , écrit dans son journal que les bancs des députés sont recouverts de serge verte. En 1670 , des fonds sont dépensés pour faire « paynting green in oyle the end of the seates, and a Dorecase and some other things », tandis qu’en 1672-1673 , on achète du « green woollen cloth » pour la chambre des députés . Sans que la couleur verte soit LA couleur de l’Angleterre , on constate combien elle est constamment présente outre manche , suffisamment pour que Jaz en pare ses boîtes anglaises .

Il en est de même pour certains réveils , telle cette version du MADRIC en livrée verte , hors catalogue en France mais dont nous connaissons trois exemplaires, issus de notre collection et de celle de Marc Barat , achetés en Grande Bretagne . horloge à poser exportCette horloge murale , là encore spécifique au marché anglais , arbore un cadran entièrement vert , qui n’a pas d’équivalent sur le continent . Argentine vendre 1°july 1956 page 67Revue Vendre du 1° Juillet 1956 .   Ce petit entrefilet dans cette revue professionnelle , spécialisée dans la publicité , prouve que Jaz savait s’adapter à ses différents marchés . Jaz Clock Co Ltd filiale implantée à Londres , dès les origines de la marque Jaz en Angleterre , était tout à fait capable de déterminer les choix à faire pour séduire la clientèle britannique .

Et pourtant ailleurs dans le monde , le vert est la couleur de Satan , du diable , des ennemis de la chrétienté , des êtres étranges : fées , sorcières , lutins , génies des bois et des eaux . Les super-héros et les Martiens, grands et petits hommes verts de la science-fiction, s’inscrivent dans cet héritage culturel , où le vert joue le rôle de l’ailleurs, de l’étrangeté, du fantastique. Pourquoi ?

Parce que c’est une couleur instable, rebelle, très difficile à fixer chimiquement. Nous avons tous appris que le vert , en l’expérimentant en primaire avec nos petits tubes de gouache , naît du mélange du jaune et du bleu . Cette combinaison, apprise dès l’école maternelle, s’est révélée très tard parce qu’a longtemps persisté un tabou , issu de la Bible, sur les mélanges : on ne fusionne pas deux matières pour en faire une troisième ; Parce que les mélanges apparaissaient comme des manifestations du désordre. La création de Dieu consistait à séparer, à mettre de l’ordre dans ce qui était confus .            Il existait surtout un règlement professionnel très strict chez les teinturiers, qui n’avaient l’autorisation de fabriquer que certaines couleurs : les cuves de bleu et de jaune ne se situaient pas au même endroit dans la ville, et personne n’aurait donc eu l’idée de les mélanger.                                                                                                                                On sait que les comédiens refusent toujours de porter du vert  sur scène , soit par superstition , soit parce que Molière serait mort habillé en vert , mais surtout parce que les composés pour obtenir du vert étaient toxiques comme les sels d’arsenics ou  le vert de gris . Plus prosaïquement les tenues vertes avaient tendance à déteindre sur la peau et lorsque l’on jouait en plein air , on devenait invisible sur fond vert . VirtuellesStudio_Greenbox Le fond vert , celui du cinéma qui permet les incrustations à l’écran , reste source d’interdiction du vert puisqu’un maquillage vert ou un vêtement sera invisible .

CORONET par Jaz Paris 1979 à 1982

coronet (4)CORONET , horloge murale à Quartz , par Jaz Paris France , comme indiqué en haut et en bas de l’index du 6 . Elle est fort similaire à la NANRIC de Jaz qui n’apparaît qu’en 1980 .Corps en plastique brun ,vitre en plexiglas , aiguilles noires fines , trotteuse centrale à talon rectangulaire , cadran doré , chiffres en fort relief , format 22,5 x 22,5 cm .coronet dosCette vue de dos nous montre la fenêtre , ici obturée , qui permet d’afficher un dateur à date et jour . Effectivement , son modèle d’origine est la RANDIC à dateur , laquelle apparaît elle aussi en 1979 . Cette CORONET et la NANRIC sont en fait des versions sans dateur de la RANDIC . La CORONET est donc un hybride des deux JAZ , reprenant le cadran doré de la RANDIC , mais n’ayant pas de dateur comme la NANRIC .

à gauche la RANDIC à dateur et à droite la NANRIC sans dateur .coronet calibreElle est bien dotée du même calibre MK que sa cousine française .argos page 217Catalogue n°12 ARGOS de 1979 printemps /été , page 217 . Le numéro 11 correspond à cette horloge estampillée Coronet sans que ne soit précisé qu’il s’agisse d’une production par Jaz ou même plus simplement son origine française . Pas plus que pour la n°14 , estampillée Smith’s Timecal , qui est pourtant , elle aussi , une production Jaz comme cela est indiqué au bas de son cadran qui est typique de la marque au jaseur boréal . Contrairement à la CORONET , cette horloge n’a pas d’équivalent chez Jaz  . Apparaît aussi , en 10 , une horloge à balancier par ACCTIM dont nous avons déjà décrit les productions par Jaz .

Couverture du catalogue ARGOS de 1979 printemps /été et la version blanche de la CORONET , qui n’a pas été distribuée sous l’estampille Jaz sur le continent . Elle aussi , est signée Jaz Paris et France en bas de cadran , autour de l’index du VI . Pour autant , elle n’apparaît pas dans les catalogues ARGOS , où la version brun/doré sera maintenue jusqu’en 1982 .

Catalogue 1979 automne/hiver et catalogue 1980 19811982Catalogue 1981 et catalogue 1982 : étrangement elle retrouve son identité française avec la disparition de la petite couronne au profit du jaseur boréal ; mais il faut attendre 1982 pour que Jaz soit crédité dans le descriptif des catalogues ARGOS .

Argos , est une institution outre manche  depuis 1972 , que l’on pourrait définir comme un mélange de Manufrance et de Prisunic , puisque l’entreprise vend essentiellement par catalogue mais dispose d’un réseau de 883 magasins de détails . Au Royaume-Uni et en Irlande , Argos Ltd touche 29 millions de clients par an et près d’un milliard de visiteurs en ligne annuel , maintenant que l’entreprise , qui a même sa chaîne de télé , est aussi sur internet .

Nous n’avons trouvé que très peu d’autres CORONET , exceptées des horloges à poser dotés de mouvement à quartz japonais ou allemand , avec toujours la petite couronne au dessus du nom puisque Coronet en anglais signifie diadème .

Nous savons que CORONET a été une des marques exploitées en Angleterre par la compagnie américaine Burwood Products Co , bien connues pour ses horloges pour le moins « spectaculaires » , souvent diffusées sous sa marque Arabesque . Burwood_Products_BrownBurwood Products

Sa spécialité était de proposer un décor , en résine , coordonné avec ses horloges qui faisaient déjà un mètre de large minimum ; l’ensemble pouvant vous prendre tout un mur … à l’américaine .

Catalogo Jaz 1981 /1982

catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (1)Ce catalogue 1981/1982 n’est pas la version en langue espagnole du catalogue Jaz français de 1981 ou 1982 ; En France il y a une édition par année destinée uniquement aux professionnels revendeurs ; Il s’agit d’une publication tout à fait originale et spécifique au marché espagnol qui présentait la particularité d’avoir une usine Jaz sur son territoire . Les réveils français ont des dénominations se terminant en -IC  ; à part quelques exceptions pour des modèles prestigieux vendus en Italie et  Belgique , les jaz étrangers n’ont pas de noms , que des références .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (2)page 1 :  Etrangement ce catalogue commence par les horloges murales , c’est exactement l’inverse en France ; la 1021C ressemble fort à une CALIC , en plus petite de 6 cm ; la référence 1006 est spécifique à l’Espagne catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (3)page 2 ; la 273 à dateur est une variante de la PRATIC que Jaz a vendue à Bulova et vendue en Allemagne sous la référence 208 avec d’autres couleurs ; la 207 en est la version sans dateur , non distribuée en France ; 2136 cette horloge n’a jamais été vendue en France, pas plus que la 2001 .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (4)page 3 ; sur cette page les assiettes et les références 2011 et 2703 sont endémiques , les autres sont des horloges identiques aux exemplaires français où présentant des toutes petites variantes par rapport à eux . catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (5)page 4 ; En revanche sur cette page tout est réservé au marché espagnol . catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (6)page 5 ; même constat sur cette page qui ne présente que des horloges espagnoles .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (7)page 6 ; là encore tout est strictement espagnol ;catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (8)page 7 : aucune de ces horloges n’a été distribuée en France ;catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (9)page 8 : on constate qu’aucune de ces horloges n’est disponible en France à l’époque , esthétiquement sans regrets .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (10)page 9 : encore une fois toutes ces horloges sont uniquement « espagnoles ».catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (11)page 10 : pas de versions françaises sur cette page 10 ; catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (12)page 11 : pas d’exemplaires distribués en France sur cette page 11 ; catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (13)page 12 : il est de même pour cette page toute espagnole .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (14)page 13 : si toutes ces pièces sont réservées aux ventes en Espagne , pour une fois on le regrette pour ces radios réveils assez élégants ; catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (15)page 14 : malgré d’apparentes similitudes aucun de ces réveils ne verra le sol français ; despertadores = réveils en français  ; ces lots de six réveils sont effectivement réservés aux horlogers espagnols . Rappelons que les catalogues Jaz , français ou espagnols ,  ne sont pas destinés à la clientèle particulière  ;catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (16)page 15 : présentés en haut de page par lots de seize réveils , ils sont détaillés en dessous permettant de nous assurer qu’aucun d’entre eux n’a été vendus en France  ; catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (17)page 20 : en revanche sur cette page , tout avait été précédemment disponible en France à part le 169 variante du POPIC de 1976 ; 1349 CLANIC  ; 1397 SCINTIC ; 1317 CORSIC ,  1346 DACRIC disparu en France en 1976 ;   165 LOPSIC ;   1331 VERTIC ; 1321 retour du  CLODIC  sept ans après sa suppression en France avec un cadran blanc ; 1320 DOCLIC  qui avait été arrêté en France en 1978 .catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (18)page 21 : 1370 DARCIC  , 1338 CARDIC  , 1323 NICLIC ; ; catalogue espagnol 1981 1982 page 0 (19)