La France en 101 objets culte par Pierre Toromanoff

Page 166 : si l’auteur nous a contacté en amont de la rédaction de cette page et nous l’a soumis avant publication dans le cadre d’une correspondance chaleureuse, elle ne nous doit quasiment rien puisque le talent de Pierre Toromanoff n’a pas besoin de nous, tant sa plume est puissante et créative. Une comparaison avec l’ouvrage, auquel nous avons consacré un article, Ces objets qui ont fait la France, pourtant sur la même trame, marque très nettement l’originalité de l’approche plus construite et littéraire, comme la citation de George Perec en préambule le laissait présager. 

Page 167 illustration en regard du texte ci-dessus par Boris Paglia
version définitive de la couverture de l’ouvrage

Pierre Toromanoff qui travaille fréquemment avec sa talentueuse épouse Agata, laquelle connaît sa propre production d’ouvrages, n’en est pas à sa première parution puisqu’on lui doit une déjà longue bibliographie qui comprend: La mer vue par les peintres en 2019 déjà chez Ouest France, Gangsters et truands: les films culte 2020, Street Art Thèmes et motifs 2018, Chapeau à venir ce mois-ci, l’art des illusions d’optique, etc. , toujours remarquablement illustrés, voir ci-dessous.

Florilège de couvertures du couple Toromanoff, seuls ou en collaborations.

  • Poids de l’article : 740 g
  • Broché : 208 pages
  • ISBN-10 : 2737383781
  • ISBN-13 : 978-2737383786
  • Dimensions du produit : 19.1 x 1.7 x 24.6 cm
  • Éditeur : Ouest-France ( sortie le 9 octobre 2020)
  • Prix : 16,90 €

Assurément un beau cadeau à faire ou s’offrir pour Noël, en vente partout, puisque l’édition est noble, le choix des objets très original et la plume savante mais légère voire humoristique: un pur bonheur! Soit vous piochez dedans au hasard, soit vous suivez sagement la pagination, passant du couteau à huitres aux verres Duralex, sans oublier trois objets appartenant quasiment à notre patrimoine immatériel: la feuille de sécu, la carte de familles nombreuses et le ticket de tiercé, si typiquement français et pourtant ignorés par les ouvrages de ce genre. Pierre Toromanoff nous construit un bel inventaire à la Prévert du génie français, créant des voisinages antinomiques, entre le bleu de travail et la bibliothèque de La Pléiade pour nous instruire, tout en nous amusant avec finesse: je vous recommande la page sur la boîte à meuh ou celle du cruel dilemme de la chocolatine ou du pain au chocolat.

On remarquera la présence quelques lignes plus haut de notre amie, Marie Pia COUSTANS, LA spécialiste des montres LIP qui prépare un ouvrage sur YEMA.

Descriptif 

De la baguette au stylo Bic et de la boule de pétanque à l’Opinel, les cent un objets rassemblés dans cet ouvrage font partie de notre vie quotidienne ou de notre imaginaire hexagonal. Fruits du génie français, ils sont devenus des objets cultes et ont trouvé leur place dans le récit national car ils reflètent l’art de vivre à la française et nous rappellent des instants passés. Ce livre leur rend hommage en racontant leur histoire insolite et passionnante qui traverse les générations et marque encore nos habitudes. Ustensiles de cuisine, jeux de société, vêtements de tous les jours y côtoient des objets plus inattendus comme le casque des Poilus, le coq gaulois, le martinet ou le Solex: si nous ne les avons pas forcément touchés de nos mains, ils appartiennent à notre mémoire collective et à celle de nos parents. Chacun y trouvera sa petite madeleine proustienne, son objet fétiche qui évoquera des heures que l’on croyait oubliées. Du plus banal ? caddie, cocotte-minute ou eau de Javel ? au plus étonnant ? bonnet phrygien ou formulaire de la Sécurité Sociale ? Tous ces objets nous invitent à redécouvrir les trésors de nos placards tout comme ceux de l’histoire de France.
( Descriptif sur le site Cultura ) 

Argot et jargon de l’horlogerie

L’argot est un langage imaginé d’abord par les voyous, en vue de rester inintelligibles excepté aux initiés à leurs crimes ou leurs secrets. Mais au fil du temps son emploi est devenu davantage un marqueur d’appartenance social. De ce point de vue, il y a autant d’argots que de groupes ou de professions, le mot argot est alors synonyme de jargon, si bien que nous avons fait le choix dans notre petit glossaire ci-dessous, de dissocier l’argot du  jargon et du parler du métier d’horloger, avec une certaine porosité entre eux tout de même. 

L’argot est un parler obscur et changeant qui, dans le cas de l’horlogerie, est celui des voleurs, quasiment uniquement. Il n’est en tous cas absolument pas pratiqué par les horlogers. 

Cette noble profession, qui était autorisée à porter l’épée sous l’ancien régime, pratique un vocabulaire particulier qui emploie quelques images destinées en général à faciliter la compréhension de sa clientèle. Toutefois les marques de haute horlogerie n’hésitent plus à jargonner pour valoriser leurs produits . 

L’argot de l’horlogerie est très restreint et assez inusité de nos jours; à titre de comparaison, on trouvera une bonne vingtaine de synonymes que tout le monde comprendra immédiatement pour le mot voiture. Pour désigner un ordinateur, entré dans notre quotidien voici un quart de siècle seulement, on trouvera plus d’équivalents lexicologiques que pour la montre, qui nous est pourtant familière depuis plus de quatre cents ans. Pour les montres de poignet , on a tout de même quelques expressions argotiques dont tocante est la seule survivante, pour les pendules peut être deux ou trois dorénavant totalement désuètes et absolument rien pour les réveils.

                      ARGOT et EXPRESSIONS ARGOTIQUES
  • avoir l’aiguille à midi = déclaration d’intérêt génésique pour une Hélène en jupette de lin ou un Hellène en mini toge, on disait alors de celui qui s’apparentait horizontalement au gnomon d’un cadran solaire qu’il avait l’aiguille à midi. On a rarement l’aiguille à midi au sommet de l’Aiguille du Midi quand l’aiguille indique midi .
  • babasse = montre à quartz bourrée de fonctions superfétatoires
  • babillarde = montre ou pendule par allusion à son tic-tac qui, malgré sa monotonie, babille et égaie la solitude
  • bassinoire = grosse montre
  • bobe ou bob = montre et sa chaîne de grosseur inusitée . Il est l’apocope de bobèche, figure de style consistant à supprimer la fin d’un mot. Probable dérivé de bobe = « rond » en ancien français
  • bobino ou bobine = montre; exemple: j’ai payé le bobino et la bride trois cigs = j’ai payé la montre et sa chaîne trois Louis; Bobine à la manque = montre en cuivre.
  • bogue = montre; bogue de plâtre = montre en argent.
  •  boguiste = horloger.
  • breloque = pendule dans l’argot des faubouriens d’où est sans doute venue l’expression : battre la breloque, pour signifier d’abord dans l’armée « annoncer à son de tambour l’heure des repas » puis au figuré, chez le peuple « déraisonner comme une pendule détraquée » ou battre la chamade pour le coeur puisque la chamade est aussi un roulement de tambour
  • broquille = minute
  • cinq à sept = moment de détente entre le travail et la vie familiale, par extension et paradoxalement, il est devenu le terme pour définir un rendez-vous extra-conjugal où il ne faut pas être trop détendu et avoir l’aiguille à six heures et demie.
  • clocher personnel = montre ( Frédéric Dard )
  • coucou = horloge de petite qualité; être remonté comme un coucou = être énervant comme l’annonce tintamarresque de l’heure, 48 fois par jour, par un volatile en bois. Le printemps venu, la femelle du coucou, au lieu de construire un nid, s’en va déposer ses œufs dans les pendules. (François Cavanna)
  • dégringolante = horloge
  • dégoulinante = horloge
  • écureuil ou grignoteur = taximètre
  • guitoune = montre respectée
  • jacquemart ou être armé comme un jacquemart = apparat sans grand effet. Le tintinnabuleur bien qu’armé d’un énorme marteau n’effraie même pas les pigeons qui le coiffent, sauf quand il remplit son rôle à heure fixe
  • lontrè = montre en louchbèm, l’argot des bouchers des Halles
  • marquer six heures et demie = (métaphore horlogère) à midi les aiguilles sont fièrement dressées vers l’astre solaire, quand à six heures et demie elles pendent lamentablement vers la terre. Synonyme = avoir le babilan en berne de cinq à sept.
  • mavontr = montre en javanais
  • midi ou démon de midi = démon poussant l’homme à la débauche au milieu de sa vie, allusion au verset 6 du Psaume 91 de l’Ancien Testament évoquant un énigmatique fléau qui dévaste à midi 
  • oignon = montre de forme rebondie
  • plombe = heure; viendrait des plombs, qui sur les horloges les plus chères, servaient de poids lesquels pouvaient être en fonte, voire même un caillou
  • savonnette = montre ancienne à double boitier ; la tige de remontoir, habituellement positionnée à 12 h, se retrouve à 3 h sur une savonnette. Ces montres à couvercle ne sont plus à la mode mais on en rencontre encore dans l’horlogerie de luxe. Le ressort qui permet d’actionner le couvercle s’appelle secret
  • tante ou avoir sa montre chez ma tante ou mettre sa montre au clou = déposer au Mont de Piété ou au Crédit Municipal. L’origine de l’expression serait due au Prince François d’Orléans, fils du roi Louis Philippe, qui prétexta avoir oublié chez « sa Tante » la montre en or que lui avait offerte sa mère, la reine Marie-Amélie, qu’il avait en fait mis en gage pour honorer une de ses nombreuses dettes de jeu. Nos amis Belges y voient le féminin d’oncle, surnom des prêteurs sur gage.
  •  tire-bogue = voleur de montres, en l’occurrence voleur d’homme ivre, dit vol au poivrier puisque poivre = alcool, d’où provient le mot poivrot.
  • tocante, toquante, tocquante, toquente = montre
  • tournante = montre dans l’argot parisien, partout ailleurs c’est une clef; le viol collectif était jadis nommé barlu, rodéo ou complot

                                                         FREDERIC DARD   

Consultez le grand article que nous avons consacré à Dard et l’horlogerie. Il semble presque impossible de ne pas citer Frédéric Dard, dans un article sur l’argot, en fait probablement à tort puisque Frédérique Dard ne fait pas tant appel à l’argot qu’à son propre langage: on estime qu’il a inventé 20.000 néologismes. Il s’agit de l’idiolecte le plus complet en français.

Lorsque le Dictionnaire San-Antonio paraît en 1993, plus de deux cents titres de Frédéric Dard s’étaient déjà vendus à des dizaines de millions d’exemplaires, sans que personne ne se plaigne de l’absence de ce glossaire qui aurait enfin rendu compréhensible cette langue si particulière. C’est un miracle de constater que nous avons pu comprendre une écriture dont plus de 15. 000 mots sont recensés comme inédits, ce qui est énorme, puisqu’on peut à peu près tout dire dans une langue avec seulement 300 mots, ne pas passer pour une brèle dans son propre idiome à partir de 700 et s’afficher en cador si l’on en utilise 3.000. Toutefois Dard semble avoir systématiquement opté pour Jaz en lieu et place du mot réveil, pour notre plus grande joie .

Les Tontons Flingueurs

Audiard passe aussi pour un maître de la gouaille et pourtant son sens de la formule drolatique repose moins sur l’argot que sur une certaine manière de torturer la langue classique, non pour l’abâtardir, mais pour lui restituer la surprise des origines. Nous ne disons pas cela pour « intimer l’ordre à certains salisseurs de mémoire qu’ils feraient mieux de fermer leur claquemerde » mais lorsque le père d’Antoine Delafoy demande la main de la « nièce » de Fernand, il voit une horloge dans le salon et s’exclame « Ohhhh! fin XVIIIe, de Ferdinand Berthoud » preuve que le dialoguiste était un autodidacte qui avait tout lu et tout vu.

LE PARLER DES HORLOGERS

Contrairement à l’argot qui se veut incompréhensible aux étrangers, les termes ci-dessous ont été choisis dans le langage commun pour être compris de tous, pour certains les analogies sont très parlantes.

  • balancier = pièce mobile servant à régulariser le mouvement d’un mécanisme d’horlogerie. Le même terme recouvre – à droite- le volant d’inertie, généralement circulaire, qui pivote autour d’un axe de rotation ou – à gauche- un pendule pesant
  • barillet = mince boîte cylindrique avec un bord denté qui entraîne les rouages, activés par le déroulement du ressort du barillet, qu’il contient et reste donc invisible, contrairement aux ressorts des gros réveils, tout apparents.
  • buildings ou aiguilles buildings = ce terme a été inventé en 2016 par notre site Jazlebontemps pour définir les aiguilles Art Déco, dont la silhouette rappelle celle des buildings de cette période .
  • calibre = le type de mouvement d’une montre, ce n’est pas un flingue mais il peut contenir un barillet!
  • carrure = élément central du boîtier d’une montre qui accueille le mouvement. Elle se trouve entre le fond de boîte et la lunette de la montre.
  • chiffres cardinaux = les chiffres XII , III , VI et IX sont définis comme cardinaux par analogie avec les points cardinaux Nord, Est, Sud et Ouest. On ne confondra pas chiffres et nombres cardinaux. Un cardinal est un nombre qui caractérise la quantité d’éléments d’un ensemble, par opposition à un nombre ordinal qui définit un rang dans une liste soit dans l’ensemble suivant: E = {1,3,5,7,9} , le cardinal de cet ensemble est donc 5 puisqu’il y a cinq chiffres, tandis que le nombre ordinal du 3 est deux, puisqu’il est en 2° position, c’est son ordre. Pourquoi le Pape ne pourrait il point donner l’ordre à ses cardinaux d’aller aux quatre points cardinaux, en nombres cardinaux ?
  • échappement = mécanisme placé entre le rouage et le balancier de la plupart des instruments destinés à mesurer le temps. Pas de pot, il s’agit d’un échappement contrôlé .
  • flip-flap = volets ou lamelles. L’étymologie est un saut périlleux qu’on exécute en touchant la terre avec les mains. Ne pas confondre avec flip-flop, onomatopée désignant le nu-pieds pour les anglo-saxons, que nous appelons tong ou tongues, nommée gougoune au Québec ou slache à Bruxelles.
  • timbre = cloche de sonnerie
  • complication = fonction qu’une montre peut posséder autre que l’indication des heures, minutes et secondes. Il n’y a bien qu’en horlogerie que l’on recherche les complications.
  • corne = les cornes ont pour fonction d’accrocher le bracelet à la montre. La petite barrette qui s’y loge grâce à de petits trous, passant aussi à l’intérieur du bracelet afin de le maintenir, est également appelée entre-corne.
  • lunette = partie de la boîte d’une montre, d’un réveil ou d’une horloge dans laquelle on place le verre. La lunette d’horlogerie a autant de rapport avec l’optique qu’une lunette de WC, le sens étant celui d’une ouverture, comme en automobile avec la lunette arrière. Les anglais disent bezel, de l’ancien français biseau, terme qui recouvre aussi le cadre entourant un écran de télévision ou un ordinateur. Dans le cas de l’ORTIC, ci-dessus, son bezel est donc en forme de bezel.
cache raquette du calibre U de Jaz
  • raquette = organe de réglage des montres et réveils. Si un tennisman joue de la raquette, on sait qu’il ne joue pas la montre, un set pouvant s’étaler sur trois jours
la similitude de forme avec une raquette de tennis n’est pas toujours aussi évidente

Il est tout de même assez étrange que des marques de montres prestigieuses choisissent des tennismen comme ambassadeurs puisqu’aucun d’entre eux ne porte de montres lors des matchs: trop lourdes, trop fragiles et surtout inutiles. Unique exception: Nadal et sa Richard Mille à tourbillon, qui pèse 25 gr bracelet compris. Elle encaisse une accélération de 5G et Richard Mille encaisse 31.080 € du gramme soit un total de 777.000€ la montre.

  •  réserve = elle maintient la vitre contre la lunette dégageant ainsi l’espace nécessaire aux aiguilles pour ne pas frotter contre le verre. Guère moins épaisse qu’une réserve indienne.
  • seconde morte = le mouvement d’une aiguille se déplaçant au rythme d’un saut par seconde; elle est typique des montres à quartz alors qu’en horlogerie mécanique, “battre la seconde” est une véritable prouesse technique, dite complication horlogère. Il n’y a pas de première morte, en dehors d’Eve: seconde n’est pas employé dans l’acception de deuxième
  • squelette = technique esthétique dans laquelle certaines parties d’une montre ont été entrouvertes afin d’en dévoiler les organes. Avoir plusieurs squelettes dans le placard fait de vous un bon collectionneur ou un bon horloger.
  • tourbillon = mis au point par Abraham-Louis Breguet en 1801 afin de compenser les écarts de marche causés par la gravité terrestre en position verticale, c’est un mécanisme qui renferme les composants permettant le va-et-vient du balancier dans une petite cage mobile au centre de la montre effectuant un tour par minute.
  • trotteuse = l’aiguille des secondes. La grande trotteuse est fixée au centre du cadran alors que la petite trotteuse est placée sur un petit cadran spécifique.
 JARGON et ACHRONYMES HORLOGERS 
  • AD : Authorised Dealer: horloger revendeur officiel d’une marque
  • Frankenwatch = montre assemblée de toute pièce et non conforme à sa configuration originelle.
  • Hybride = corps de réveil affublé d’un mouvement d’une autre marque
  • JLC : Jaeger-LeCoultre RM : Richard Mille L&S : Lange&Söhne AP : Audemars Piguet VC : Vacheron Constantin
  • Q, QA, QP  = Quantième, Quantième Annuel et Quantième Perpétuel
  • NATO = NATO ( ou OTAN) est un bracelet de tissu crée pour les militaires.
  • N.O.S = Neuf de Stock ; une montre d’antan, neuve de stock et jamais portée complète. 
  • PDL : Phase de lune: complication qui donne la forme de la lune.
  • RdM = Réserve de Marche.
  • Toolwatch = une « montre outil ». Métaphore du jargon des collectionneurs désignant une montre que vous portez partout quelque soit le lieu et les circonstances, une « indestructible »
Quelques citations d’argot 
1843 le président Bresson qui sait ses Mystères de Paris, daignait expliquer à un grinche, qui feignait de l’ignorer, le sens du mot toquante (montre). Un autre grinche se leva aussitôt et dit : –Pardon, M. le président, vous êtes dans l’erreur : le mot toquante ne se dit plus dans l’argot depuis plus de dix ans. Une montre s’exprime par un autre mot. M. le président. –Quel est ce mot ? Le grinche. –Bobineau et par abréviation Bob. source : 1843. Ignorance de M. Eugène Sue  
1843 Le président rappelait à l’accusé, qu’au dire d’un témoin, il se serait vanté de mettre la main sur la toquante. Levasseur : Toquante ? Qu’est-ce que c’est que ce mot-là ? connais pas. Desmarais, gendarme : Au mois de décembre dernier, j’ai été requis d’arrêter l’accusé Levasseur, et d’assister à la perquisition faite au domicile de Souques, où nous avons trouvé une quantité considérable de fausses clés. Levasseur, à cette occasion, a dit : « Quel dommage que je ne sois pas entré seul ! j’aurais mis la main sur la toquante. » Levasseur : Mais enfin, qu’est-ce que c’est que ça, la toquante ? Je n’ai pas été initié à un pareil langage. M. le président : Ne feignez pas d’ignorer ce que vous savez mieux que personne. Toquante, dans l’origine, voulait dire montre ; depuis, son acception s’est étendue, il veut dire aujourd’hui tout ce qui est bon à prendre. Clivat, se levant : Pardon, M. le président, vous êtes dans l’erreur, le mot toquante ne se dit plus dans l’argot, depuis plus de dix ans (rires dans l’auditoire). Une montre s’exprime par un autre mot que je dirais bien… M. le président : Quel est ce mot ? Clivat : Bob ou bobineau. source : 1843. Littérature bigorne  
1927 T’as donc pas une tocante sur toi, pour confectionner une sole avec un ressort ? source : 1927. A la revoyure – Nouvelles aventures des Pieds Nickelés, dans Les Pieds-Nickelés en Amérique (1921-1927)  
1956 la totteuse de la toquante poursuivait sa ronde circulaire autour du cadran source : 1956. M’as-tu vu en cadavre ?  
1829 J’ai fait suer un chêne […] Son auberg j’ai enganté, […] Son auberg et sa toquante source : 1829. Rue du mail, dans Le dernier jour d’un condamné  
1834 Et moi qui suis bon drille, / Sûr, je vais droit au pentre / Enganter son chasson. / Son chasson, sa toquante, / Ses attaches brillantes source : 1834. Un soir à la Croix-Rouge, dans Chabot (Charles), Une infirmerie de prison, dans Paris ou le livre des cent-et-un  
xxx J’engantai sa toquante source : xxx. Chanson morale (Chansons dans la langue bigorne), dans François-Vincent Raspail ou le bon usage de la prison  
1854 –Allons, aboulons la toquante. –La toquante ? –Eh ! bien… oui, la montre. –La voilà !… source : 1854. Les rues de Paris. Mélodrame populaire en 6 actes et 8 tableaux  
1910 Le Président, ayant voulu consulter sa toquante pour voir si c’était l’heure d’aller déjeuner, s’aperçut avec tristesse qu’on le lui avait soulevée source : 1910. À la conquête du Pôle Nord, dans La bande des Pieds Nickelés (1908-1912)  
1856 quand j’entendis l’un d’elle parler Argot en me regardant. […] il s’agissait seulement pour rire de pincer ma toquante. source : 1856. Histoire anecdotique du théâtre, de la littérature et de diverses impressions contemporaines tirée du coffre d’un journaliste avec sa vie à tort et à travers  
1976 En passant sous l’arc du faubourg Saint-Denis, Raf frima machinalement sa tocante. source : 1976. Histoire criminelle de Rafaël Mendoza
1862 Tu d’vrais bien m’donner ton petit dada qu’t’as au bout de la canelle de ton bogne source : 1862. Mémoires de Canler, ancien chef du service de sûreté 1797-1865  
1968 J’ai toujours bogue et bon radin source : 1968. Le gouêpeur et le voleur (Chansons dans la langue bigorne), dans François-Vincent Raspail ou le bon usage de la prison (etc.)  
xxx Nous attendions la sorgue, / Voulant poisser des bogues source : xxx. Chanson morale (Chansons dans la langue bigorne), dans François-Vincent Raspail ou le bon usage de la prison  
1872 Ma bogue est au Mont-Pegal. source : 1872. Dictionnaire d’argot ou de jargue (4)  
1821 Pour trois brides de bogues, le fourga m’a recoqué 6 balles. source : 1821. Glossaire argotique des mots employés au bagne de Brest  
1821 J’ai abloquit 3 bogues pour 18 Balles. source : 1821. Glossaire argotique des mots employés au bagne de Brest  
1821 je vais pésiller une gothon et aller au mislocq faire des bogues. source : 1821. Glossaire argotique des mots employés au bagne de Brest  
1821 Il croioit avoir deux Bogues d’orient, elles Sont de tartre. source : 1821. Glossaire argotique des mots employés au bagne de Brest

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Jaz et l’horlogerie chez Frédéric DARD

Je me suis levé avec lassitude. Ma montre dit treize heures, ce qui est un tour de force pour un cadran numéroté jusqu’à douze.  Frédéric Dard 

Frédéric DARD est certainement l’auteur qui cite le plus souvent Jaz dans ses romans. En fait, le père de San-Antonio joue systématiquement le jeu de l’antonomase, tellement souhaitée par les fondateurs de Jaz, qui consiste à remplacer le mot réveil par celui de Jaz. L’auteur était certain d’être compris tellement la marque était populaire. En 1973, Jaz atteint un taux de notoriété de 87,1 %, soit près de neuf Français sur dix qui connaissent les Jaz, devenus synonymes de réveils.

 Les sixties ont pourtant été le temps d’une forte concurrence pour la marque au jaseur boréal mais Dard n’emploie ni Vedette, ni Bayard  pour des raisons évidentes de confusion puisque ces deux noms correspondaient aussi à des marques, bien connues à cette période, d’électro-ménager ou de stylos, voire de vêtements; ni Smi, ni Dep, ni Blangy non plus parce que ces marques étaient bien trop confidentielles. Pour Dard comme d’autres auteurs, l’équation était: Jaz = réveil; il ne prenait pas de risque, il savait qu’en employant juste Jaz, il serait compris de son lectorat. Concernant les réveils, la chose est entendue: Frédéric Dard a fait son choix, c’est Jaz sans qu’aucun accord commercial n’ait été conclu avec la marque. Les Jaz ne sont d’ailleurs pas valorisés spécifiquement, ils sont tout simplement mentionnés, sans épithètes mélioratives.                                                                              

D’ailleurs on le verra citer des marques à foison: Ambre Solaire, la crème Nivea, le détachant K2r , la compagnie Swissair, les pneus Firestone, les vins Postillon, la farine Jacquemaire, fraiseur chez Renault, le catalogue du Fleuve Noir, etc . Parfois il y va d’une petite phrase: buvez Coca-Cola glacé, il y a des lézards de la marque Hermès la plus recherché , j’accepte volontiers de poser dans la vitrine de Fauchon, etc.                                                                      

Consultez, en complément de cet article , notre dossier l’argot en horlogerie  

Concernant les montres, il en est souvent tout autrement, comme on le constate à la lecture de L’archipel des Malotrus, à la page 127 ou 108 suivant les éditions, où Dard y va d’un petit laïus et d’un jeu de mots sur DIFOR.

DIFOR, acronyme de la DIFfusion hORlogère, était une marque bisontine de vente par correspondance et assembleur de montres, emboîtant aussi bien des mouvement français que suisses, laquelle a connu son apogée au cours des années 60, durant lesquelles la marque fut le regroupement d’une petite dizaine de sociétés horlogères de la région dont Sarda. La société sera en partie reprise par Maty, son principal concurrent, en 1982.

Nous savons par Francis Dauphiné, fils de André le fondateur de Difor, qu’il suffisait d’expédier une belle montre à Frédéric Dard, pour obtenir un petit hommage appuyé dans le prochain San Antonio. On est étonné de cet accord avec ce petit nom de l’horlogerie, qui faisait néanmoins des montres de qualité. D’autant qu’auteur à succès, il connaît la gloire et la fortune qui lui permettent une générosité sans bornes et c’est sans doute le secret de cet accord informel puisqu’on a jamais vu de Difor au poignet de l’écrivain: peut être fallait il regarder aux poignets de ses amis? Son exil fiscal en Suisse, exalte son goût pour les belles voitures et le luxe ostentatoire, qui finissent par attirer l’attention d’un malfrat qui enlève sa fille Joséphine, épouse de Guy Carlier, en 1983 et obtient de lui deux millions de Francs Suisses. Cette rançon est une preuve douloureuse et indirecte de son niveau de fortune. Son rapport à l’argent, bien mérité d’un des écrivains les plus prolixes du XX° siècle, est à la fois décomplexé et enfantin: s’approchant de sa nouvelle Jaguar, il avoue: «Je plaide coupable. La seule chose matérielle qui m’intéresse, c’est la voiture. Juste avant, j’avais une Ferrari. Voilà. Je suis un gosse.» 

En général, DARD apparaît avec une montre Piaget en or
Mais on l’a vu arborer différentes autres montres de luxe

PIAGET San- Antonio Minuit , boîtier n°19 de 1980 . Spécialement conçue pour Frédéric Dard et produite à un nombre très limité d’exemplaires en or jaune et blanc 18 carats. Dim. 35 x 26 mm Vendue 6.325 CHF à la vente aux enchères Antiquorum n°155 le 14 octobre 1990 lot n°28

Toutefois, la montre la plus emblématique est d’évidence la montre que Piaget a créé pour lui. Elle est en forme de livre et si elle est baptisée MINUIT, c’est qu’en lieu et place du chiffre XII on trouve la mention Minuit manuscrite, peu visible sur cette photo.

La montre de Frédéric Dard, MINUIT,  peut paraître ostentatoire, mais il faut la rapporter à l’aune de l’amitié sincère qui unissait l’écrivain résidant en Suisse au jeune héritier de la manufacture familiale, Yves Piaget dont la marque, devenue protagoniste des mondanités et de la jet set internationale, avait entrepris une course effrénée et folle contre la maison Vacheron-Constantin pour produire la montre la plus chère du monde, multipliant à l’infini les pavages de diamants de plus en plus chargés. Dans ce contexte, la montre de Dard semble presque sobre.                                           

En revanche les citations pour Piaget sont rares « Je l’examine avec l’attention d’un horloger en train de réparer une Piaget extra-plate »

Montre San-Antonio de l’horloger suisse Mathey-Tissot offerte par Frédéric Dard à François Rivière après un rendez-vous en retard. Frédéric Dard la portait à son poignet et l’a donnée à François Rivière en lui disant que maintenant il n’avait plus d’excuse. Collection personnelle de François Rivière, auteur de la biographie Frédéric Dard ou la vie privée de San-Antonio.

Par cette anecdote, nous savons que Dard ne portait pas que des montres de son ami Yves Piaget, mais nous avons une nouvelle confirmation de sa générosité sans limite puisque  Mathey-Tissot est une marque de montres de prestige. 

Plus prosaïques sont les montres réalisées par l’horloger suisse Gasser,  avec un bracelet marqué San-Antonio et un cadran décoré d’une cible et d’un pistolet.

Dernier, ou plutôt premier, clin d’œil à l’horlogerie, dès l’entrée du Paradou, sa maison helvétique au nom provençal, un énorme cintre supportant une grande montre molle translucide saute aux yeux: une sculpture de Dalí, évidemment.

Je n’ai plus besoin de montre… je mange des tic-tac.
Patrick Sébastien in Carnet de Notes 2001, livre inspiré par son ami Frédéric Dard

SAN-ANTONIO « LES ANGES SE FONT PLUMER » DE FRÉDÉRIC DARD 1957

Les anges se font plumer est le quatrième San Antonio que nous citons dans cette rubrique; nous le devons encore une fois à un couple d’amis,  fidèles abonnés de notre Facebook Jaz Le Bon Temps, Carole et Vincent DROUIN, les farfadets du château de Cénevières dans le Lot, que nous remercions toujours chaleureusement.

Nous ne recopierons pas notre analyse qui reste valable pour toute l’œuvre de Frédéric Dard, il suffit de vous y reporter mais force est de constater que Jaz était assurément synonyme de réveils à l’époque: l’antonomase de réveil.

 

Frédéric Dard à San-Antonio (Texas) en 1957.
 Extrait de Frédéric Dard mon père, par Joséphine Dard (Michel Lafon)/DR

1957, date de parution de ce livre, Dard se rend en pèlerinage au Texas, dans la ville de San Antonio. « Il a envoyé des cartes postales aux libraires », s’amuse sa fille Joséphine. son épouse Odette l’accompagnait: « Il a improvisé un voyage en bus Greyhound, depuis New York. Aussitôt arrivé à San Antonio, il a loué une belle américaine. Nous avons sympathisé avec un cow-boy et découvert qu’il s’agissait d’un curé ! » 

on le constate au fil des ses romans et à la quatrième de couverture de ce roman , Frédéric Dard n’hésite jamais à citer une marque : en l’occurrence le détachant K2r.

La chair à vif par Gilles Rosset roman de 1971

La chair à vifOn notera d’abord que le mot Jaz est employé comme une antonomase : c’est à dire en lieu et place du mot réveil , sans lui être même associé . Consultez notre article Jaz et les antonomases . Il était évident pour l’auteur qu’il serait compris : Jaz était à l’époque synonyme de réveil . La sonnerie puissante est qualifiée de « carillon affreux » et il rappelle qu’il ne fallait pas omettre de remonter son réveil mécanique : il s’agissait d’un rituel qui se faisait en général juste avant le coucher assis au bord du lit . Indirectement , c’est le Jaz qui donne son titre à l’ouvrage puisque ce réveil violent provoqué , trop tôt , par la sonnerie déchirante est ressentie comme lorsqu’un sparadrap arrache la peau et expose la chair à vif .

Gilles Rosset , né à  Paris en 1927 , mais Normand d’origine , et mort à Valognes, dans la Manche en  2014 est un écrivain français réputé qui publie son premier roman, « Les rois fainéants », aux Éditions Plon en 1956. Le dernier, « Dans l’intérêt des familles » est paru aux Éditions de Fallois en 1992.

Il a passé son enfance à Madrid, en Espagne et a souffert du bilinguisme franco espagnol. Il a quitté l’Espagne au début de la guerre civile.

La chair à vif dosPetit clin d’oeil supplémentaire en quatrième de couverture : l’auteur  » jazze la langue »,  effectivement son style est alerte et allant. Enfin son héros Alex porte une Oméga au poignet . De nos jours, ce roman post soixante-huitard , mettant en scène les ébats d’un quarantenaire et une adolescente de seize ans, ne passerait sûrement pas les fourches Caudines de la bien-pensance puritaine actuelle : à tort ou à raison , à vous de juger sans oublier que c’est un roman .

Des vies de chat roman de Christian Viollet 2015

des vies de chat Christian ViolletEncore un roman qui commence avec Jaz , même s’il n’a pas la renommée mondiale du roman  la Disparition de Georges PEREC , ni la même portée symbolique avec le mot Jaz  pour évoquer sa mère , ouvrière chez Jaz en 1942 , puis exterminée à Auschwitz.                                                                                                                                                                                                                                                                                                     L’auteur est un ancien professeur d’histoire, qui commet toutefois une petite erreur en bas de page , que nos confrères collectionneurs de montres n’auront pas manqué de débusquer .

LIP DARK MASTER 1974/1975 et TALLON son créateur en décor de fauteuil                                                                                                                                                             Manu , son héros , n’a pas pu acheter de montre Lip Dark Master lors des fameuses ventes sauvages qu’organisent les ouvriers en grève de la manufacture bisontine , parce celles-ci ont lieu en 1973 . En Janvier 1974  sont signés les accords de Dôle qui prévoient de reprendre l’ensemble du personnel contre la restitution de sept tonnes de documents et de matériel , entre 15 000 et 20 000 montres , ainsi qu’un chèque de deux millions de francs qui correspond au reliquat des ventes sauvages de montres qui avaient exaspéré les horlogers revendeurs courroucés par cette concurrence illégale .                                  Claude Neuschwander, reprend alors l’activité horlogerie de Lip avec la réintégration de 830 ouvriers , à partir de mars 1974 , marquant la fin de la grève . C’est justement parce qu’il est solidaire de ce mouvement ouvrier que Roger Tallon , père du design industriel français , des trains Corail , du TGV – entre autres centaines de création – répond à l’appel de Neuschwander en apportant un regard extrêmement novateur sur la montre pour l’époque et dessinant en 1974 l’emblématique gamme Mach 2000 , produite à partir de 1975 .                                                                                                                                                                                                                                                                            En fait , dans sa description du Jaz , Christian Viollet commet une autre anachronisme puisqu’il est censé être le réveil d’enfance de son héros, lequel était forcément adulte lorsqu’il achète une Lip dans les années 70 . On comprend qu’il s’agit d’un réveil à cloche extérieure puisqu’il peut en arrêter le marteau avec le doigt ; rc3a9veil-comtois-jaz-classicSauf que la première qualité et innovation des Jaz a été la suppressions des cloches , voire l’article du CLASSIC .

Fière de cette nouveauté , Jaz n’a renoué avec les réveils à cloches qu’en 1969 avec les GROLIC , BICLIC puis PEINTRIC . En outre , ils sont dotés d’aiguilles cathédrales ou Breguet qui n’auraient pas formés une barre verticale parfaite comme avec les aiguilles bâtons qu’il imagine . Surtout , il n’existe aucun Jaz à cloches avant cette date de 1969 . Mais après tout , il s’agit d’une fiction pas d’un documentaire .

Des vies de chat , publié en 2015 est le premier roman de cet historien spécialiste du dessin politique de presse qui collabore donc avec Cabu et intervient dans SCORBUT.EU , le site des dessinateurs de Charlie Hebdo et du Canard Enchaîné . Il avait publié en 2012 un ouvrage historique chez l’Harmattan , Dix jours à Alger , sous titré Carnets d’un printemps manqué , février 2011 , à propos du printemps arabe qui se fait toujours attendre en Algérie , où Christian Viollet a séjourné .

 

Cyrla Szulewicz 1922+1943 mère de Georges PEREC

 

Portrait de Cyrla Szulewicz en 1938 et certificat du 8 janvier 1959 attestant que Cyrla Perec fut employée par la société Jaz du 11 décembre 1941 au 8 décembre 1942 .acte_disparition-mere_perecacte de disparition, en date du 19 août 1947, de la mère de Georges Perec, Cyrla Szulewicz © fonds Georges Perec, bibliothèque de l’Arsenal .                                                                                                                                                                                  C’est évident , le titre du roman le plus célèbre de Georges Pérec , La Disparition , prend tout son sens à la lecture de ce document et si le nom Jaz est cité dès la première ligne de son livre c’est parce qu’il évoque en fait sa mère . La perte de son père , soldat mortellement blessé par un obus le 16 juin 1940 , se manifeste dans un semblant de matérialité – une tombe avec un nom lisible sur laquelle il se rendra en 1956 – celle de sa mère est en revanche une véritable disparition . Après le 11 février 1943 ,  il n’existe plus aucune trace d’elle , pas même une sépulture . Perec est hanté par la perte de ses souvenirs : envoyé loin du danger et du drame , il a été exclu à la fois de l’Histoire et de son histoire personnelle .

Famille-devant-le-mur-des-noms-Mémorial-de-la-Shoah-Paris

Le nom de Cyrla Pérec au mur du mémorial de la Shoha à Paris 

 

Georges à cinq ans ( à gauche ) et dans sa classe à l’école maternelle de la rue des Couronnes en 1939 . Il est au troisième rang , à droite .

Georges Perec est né à Belleville, 19 rue de l’Atlas, dans le XIX° , le 7 mars 1936, d’Icek Judko Perec , devenu Isie ou André pour ses proches et de Cyrla Szulewicz , dite Cécile, le père venu de Lubartów, dans le sud est de la Pologne , la mère de Varsovie . Ils vivent alors rue Vilin , à Ménilmontant, dans cette pauvreté que partagent beaucoup d’immigrés juifs d’Europe de l’Est .                                                                                                          pèrec branche paternelleLes grands-parents paternels habitent 24 rue Vilin , la grand-mère Rojza Walersztejn-Peretz y tenant un magasin d’alimentation . Le grand-père maternel, Aron Szulewicz, resté veuf , est marchand de quatre-saisons , lui aussi rue Vilin , au numéro 1 . Le père aurait exercé divers métiers (livreur, tourneur, mouleur, fondeur, coiffeur…). La mère a tenu une boutique de coiffure, puis a été, entre 1941 et 1942, ouvrière dans l’usine d’horlogerie Jaz à Puteaux . C’est une petite enfance prolétaire qu’a connue Georges Perec. Ses grands-parents parlaient le yiddish et l’un des grands-pères , David Peretz , est réputé avoir été très pieux ; Mais la volonté de faire de cet enfant un petit Français est évidente : il a été doté d’un seul prénom , Georges , sans référence à la tradition juive .                                                                                                                                                   Une bonne part de la famille maternelle a péri en déportation : le père de Cyrla , un de ses trois frères et sa jeune sœur , Soura dite Fanny , âgée alors de seize ans . Les deux autres frères purent se cacher , mais perdirent contact avec la famille de Georges . Le grand-père paternel , David Peretz , fut raflé en janvier 1943 et mourut étouffé dans le train parti de Drancy ,   son nom précède celui de Cyrla sur le mur du Mémorial de la Shoha . La grand-mère , Rojza ou Rose , put rejoindre sa fille Esther dans le Vercors . Elle vécut après la guerre en Israël avec son autre fils , Lejzor dit Léon .pérec coiffureL’entrée du salon de coiffure pris en gérance par Cyrla Perec , au 24 rue Vilin , tout de suite avant son entrée chez Jaz . En 1976 , l’inscription au-dessus de la porte était encore lisible .entreprise juiveSuite à l’adoption du premier « Statut des Juifs » par l’État français , le 27 septembre 1940 tout commerçant juif se voyait contraint de disposer cette affiche à l’entrée de son magasin . Cyrla Pérec a donc été obligé de l’apposer sur la devanture de sa petite boutique . Cette première ordonnance interdisait déjà aux Juifs français d’exercer un certain nombre de professions tels que fonctionnaires , enseignants , journalistes ou dirigeants de certaines entreprises sensibles . D’ailleurs l’un des co-fondateur de Jaz , Ivan Benel qui était aussi de confession juive , avait cédé sa place à Paul Nicolas en 1940 , pour se réfugier en Lozère . Mais le deuxième « Statut des Juifs » , promulgué le 2 Juin 1941 et un décret passé en Juillet 1941 durcit encore les conditions professionnelles des israélites et les excluent quasiment totalement des professions commerciales ou industrielles . La mère de Georges ne peut plus gérer un établissement commercial et elle devient salariée chez Jaz , cinq mois plus tard .

L’épisode de l’affichette « Entreprise juive » n’a été que de courte durée et l’étape suivante consiste à « liquider » les commerces et entreprises juives . Nous ne savons pourquoi Cyrla quitte Jaz en Décembre 1942 mais il est certain que depuis Juin  , elle devait porter l’étoile jaune à son revers . Conséquence étonnante , cette visibilité soudaine permet l’application d’une interdiction plus ancienne qui frappait déjà les « nègres » aisément repérables mais également  les juifs qui pouvaient y échapper jusque là : l’obligation de ne prendre que la dernière voiture dans le métro parisien .                  Ce marquage infâme permet l’application de cette ségrégation supplémentaire et la mère de Georges a forcément subi cette longue humiliation pour se rendre à l’usine Jaz qui se trouvait à l’opposé de son domicile , à l’autre bout de Paris qu’elle devait traverser d’Est en Ouest et retour . On sait par son fils qu’elle a été victime d’un accident du travail chez Jaz : sa main a été percée , lui évoquant les stigmates du Christ  .

Georges Pérec en pélerinage rue Vilin en 1974 et l’escalier de la rue en 1971 . Spirale du vide autour du passé de Georges Pérec puisque même la rue Vilin disparaît à son tour dans les années 1980 , remplacée par le parc de Belleville .

 

 

Je te promets la liberté Roman de Laurent Gounelle

laurent Gounelle (2)Roman  Je te promets la liberté de Laurent Gounelle dont les livres  sont tous des best-sellers , traduits dans le monde entier.laurent Gounelle (3)Si l’action  , dans ce chapitre ,  se déroule en 1964 , l’auteur du roman est né deux ans plus tard en 1966 . Preuve est qu’il a mené une enquête rigoureuse sur cette période , puisque le premier réveil électrique Jaz apparaît bien en 1964 , le DRILIC de la gamme des Jazistor .laurent Gounelle (1)On voit combien Gounelle tient à preciser que le réveil est bien un Jaz électrique. Grâce à ce genre d’auteur , Jaz reste d’actualité .

je-te-promets-la-liberte-en-librairieAvec son nouveau roman à suspense,  Laurent Gounelle vous entraîne au cœur d’une  histoire exaltante dans laquelle  vous allez vous perdre… et vous retrouver.

Imaginez  : votre employeur vous laisse dix jours pour sauver votre poste et, le soir même, votre conjoint vous laisse entendre que votre couple n’en a plus pour longtemps… Dans les deux cas, on vous reproche votre personnalité, mais qu’y pouvez-vous  ?
Lorsqu’un ami vous parle d’un homme mystérieux, membre d’une confrérie très secrète détentrice d’un savoir ancestral, qui a le pouvoir d’installer en vous une toute nouvelle personnalité, la perspective est peut-être tentante…C’est ce qui arrive à Sybille Shirdoon, l’héroïne de cette histoire  : confrontée à l’échec, à la séparation, à la trahison, mais aussi au bonheur, à la joie, à l’amour, elle s’embarque alors dans un chemin extraordinaire vers la découverte de soi et des autres.

 

San Antonio « On t’enverra du monde » de Frédéric Dard

on t'enverra du monde (1)San Antonio  » On t’enverra du monde » roman de 1963 par Frédéric Dard  .                                                                                                                                                       Avec le Gala des Emplumés et  J’suis comme ça    , il s’agit du troisième San Antonio que nous citons parce que leur auteur , le truculent et hyper productif Frédéric Dard , emploie le terme Jaz en lieu et place de réveil . Reportez vous à ces deux articles pour l’analyse de son utilisation de Jaz comme antonomase du mot réveil . En revanche , on peut s’étonner cette fois d’une petite faute puisque Jaz est orthographié avec deux ZZ en Jazz . on t'enverra du monde (2)il s’agit en fait probablement d’une coquille d’un typographe , décidément étourdi , puisque , quelques pages plus tôt ,  il oubliait le H du célèbre carossier Henri CHAPRON . Voyez notre article consacré à l’exposition du CNAM en 1949 pour se rendre compte que cette faute pouvait être partagé par les établissements les plus prestigieux … on t'enverra du monde (1)En revanche si l’orthographe est fautive , la description correspond bien à un Jaz à répétition ; publié en 1963  il peut s’agir , à cette date , d’un RUZIC , d’un ORZIC , d’un TURZIC  , d’un TRUPLIC ou d’un réveil plus ancien . Toutefois on reconnait le slogan publicitaire du TRUPLIC  : Réveil incertain , sommeil profond : mais le TRUPLIC sonne TROIS FOIS ,  même s’il avait eu cours dix ans plus tôt .on t'enverra du monde (3)Une fois encore nous devons cette trouvaille à un couple d’amis , artistes peintres et fidèles abonnés de notre  Facebook Jaz Le Bon Temps , Carole et Vincent DROUIN que nous remercions chaleureusement .

San Antonio  » le Gala des Emplumés » de Frédéric Dard

San Antonio Le Gala des Emplumés page 174 175San Antonio  » le Gala des Emplumés » roman de 1963 par Frédéric Dard  .

 

On comptabilise pas moins de six versions différentes de la couverture de ce roman Le Gala des Emplumés , donnant une idée de l’ampleur de sa diffusion.                                                                                                                                                               Nous avions déjà cité un roman de Frédéric Dard  » J’suis comme ça « grâce à notre ami Stéphane , créateur du site  https://sites.google.com/site/jazmontrevintage/ ; cette fois nous le devons à un couple d’amis , artistes peintres et fidèles abonnés de notre  Facebook Jaz Le Bon Temps , Carole et Vincent DROUIN que nous remercions chaleureusement .                                                                                                                                                                                                                                                                                            Nous ne recopierons pas notre analyse qui reste valable pour toute l’œuvre de Frédéric Dard , il suffit de vous y reporter mais force est de constater que Jaz était assurément synonyme de réveils à l’époque . Les sixties ont pourtant été le temps d’une forte concurrence mais Dard n’emploie ni Vedette , ni Bayard  pour des raisons évidentes de confusion puisque ces deux noms correspondaient aussi à des marques , bien connues à cette période , d’électro-ménager ou de stylos , voire de vêtements ; ni Smi , ni Dep , ni Blangy non plus parce que bien trop confidentiels . Pour Dard comme d’autres auteurs , l’équation était : Jaz = réveil ; il ne prenait pas de risque , il savait qu’en employant juste Jaz , il serait compris de son lectorat .                                                                                                                                                                                                                                                                     Le nom si bien choisi par Georges Scemama ( lire l’origine du nom Jaz ) et la réussite commerciale de la marque ont fait de Jaz le synonyme de réveil-matin comme le prouve ce nouveau roman . Scemama l’avait théorisé et prévu dans un article de la revue Vendre en 1934 : Notons ceci : Jaz ! jamais réveil Jaz ; c’est inutile  c’est même nuisible . On ne parle plus de réveil ; il n’existe plus ce mot , il est remplacé par un synonyme : un Jaz .         Voyez notre article sur Jaz et les antonomases .Livre-audio-cassettes-le-gala-des-emplumésNous vous en recommandons la version en audio-lecture par Julien Guiomar et Guy Marchand , enregistrée sur deux cassettes audio en Mai 1988 Pins-Le-gala-des-empluméspin’s le gala des emplumés