Origine du nom JAZ

 

Spécialement avec les plaques de rue , le choix de la Compagnie Industrielle de Mécanique Horlogère  « C.I.M.H. » de choisir JAZ comme nom commercial apparaît comme extrêmement judicieux . Sa brièveté , une seule syllabe de trois lettres , se voit de très loin . Le nom  JAZ étant vite devenu synonyme de réveil , outre la publicité faite à la marque , elle permettait d’identifier de loin la boutique d’un horloger . On ne peut s’empêcher de penser que la CIMH s’est inspiré de LIP qui l’avait précédé de 20 ans dans le monde de l’horlogerie . En  1924 Ivan Benel co-fondateur de la marque accorde une interview à la revue « Vendre »où il évoque l’importance du mot Jaz dans le succès de son entreprise « Et tout d’abord , baptiser notre enfant, lui donner un nom , une marque ; pour prendre mon expression de tout à l’heure : un état civil […] Etait-ce le nom si particulier , était-ce l’évident avantage d’un réveil de marque qui emporta le premier succès ? Il est difficile de le dire : je me borne à le constater , mais je tiens à en souligner l’importance […] Cette marque , ce fut « Jaz » ; je ne revendique pas le mérite d’avoir trouvé ce mot ; M .Georges Scemama qui est à la fois un de nos administrateurs et dirige notre publicité vous dira , si vous allez le voir, les raisons qui ont guidé son choix . Le mot est bref, sonore, facile à retenir, sympathique ». Interrogé le publicitaire répond « Comment j’ai trouvé le nom? Evidemment, vous l’avez deviné: par une corrélation d’idée avec jazz-band. Il fallait quelque chose qui évoque un bruit joyeux…le mot s’est présenté à mon esprit, il avait toutes les qualités requises , je l’ai adopté » .Est ce bien la véritable raison du choix de la dénomination JAZ  ou une légende que le communiquant veut répandre ?  en étudiant son étymologie on pourrait en  douter …

Les recherches de Gerald Cohen indiquent que le mot Jazz apparaît pour la première fois sous la plume de E. T. « Scoop » Gleeson dans le San Francisco bulletin en mars 1913. La plupart des historiens penchent cependant sur le fait que ce mot est apparu pour la première fois dans le Chigago Herald du 1er Mai 1916 . Il appartient au jargon du basball pour désigner l’énergie d’un joueur. Le mot aurait été employé pour qualifier la musique du groupe d’Art Hickman qui jouait dans le camp d’entraînement des San Francisco Seal . Le groupe endossa l’adjectif lors de ses engagements à New York en 1914 et le terme se répandit progressivement jusqu’à Chicago avant de revenir à La Nouvelle-Orléans sous la forme d’une lettre de Freddie Keppard à King Oliver qui le popularisera dès 1917 avec son protégé Louis Amstrong . Toutefois les prostituées de la Nouvelle -Orléans étaient appelées « jazz-belles » en argot cajun , en référence soit à la Jézabel biblique, soit au jasmin dont elles se parfumaient et ceux qui les fréquentaient étaient appelés « jazzmen ». En raison de ses connotations scabreuses , le terme était diversement apprécié des musiciens , Duke Ellington en particulier préférait l’appellation « Negro music ». La diffusion du mot « jazz », bien que sous sa forme Jass , est largement associée à son apparition sur le premier enregistrement sonore du style , en mars 1917 par l’Original Dixieland Jass Band . La légende selon laquelle Jaz tirerait son nom de ce style musical importé par les soldats américains paraît au prime abord peu crédible puisqu’il était très généralement encore nommé « rag », qu’en 1919 – date de la fondation  de la marque JAZ – il était totalement « underground » en France et qu’il restera longtemps très mal vu dans certains milieux peu « négrophiles » . Il faudra attendre « la Revue Nègre » en 1925 au Théatre des Champs Elysées avec Joséphine Baker en vedette pour que le Jazz connaisse un réel retentissement auprès des français et encore il est essentiellement question de Charleston . Les origines de l’entrée du jazz dans l’ère de la massification se situent dans les années 1930 , lorsqu’une petite avant-garde d’amateurs se donne pour objectif de contribuer à la diffusion et à la reconnaissance esthétique de cette musique encore très mal connue dans l’Hexagone . Cette origine affirmée pour un choix aussi capital que son nom commercial semble chronologiquement fort improbable et donc plus qu’osée de la part de la toute nouvelle CIMH pour une marque de grande diffusion . Et pourtant c’est ainsi que Georges Scemama le publicitaire présente la chose quelques années plus tard dans une version que l’on pourrait croire enjolivée pour la postérité puisque l’on remarquera que le fondateur Ivan Benel ne se prononce pas , laissant son communiquant en assumer paternité et étymologie                                                                                                                                                                       D’ailleurs certains prétendent que JAZ serait l’acronyme des initiales des trois ingénieurs qui conçurent les premiers modèles , s’appuyant sur l’existence réelle d’un technicien nommé Zedler . Pourtant à la lecture des noms  déposés par la CIMH le 25 Juillet 1919 au Greffe du Tribunal de Commerce de Paris pour son nom commercial , le doute n’est plus guère permis . Selon l’usage de l’époque pour les marques populaires , la plupart sont des homophonies qu’il faut décrypter en les lisant à haute voix : un amusant DORTU qu’il faut entendre « dors tu ? » ou  un OZARM assurément offensif et d’actualité pour  cette référence à « la Marseillaise » à l’issue de la Grande Guerre . CLERSON avait déjà une connotation américaine et ce  » clair sonne » aurait fort bien convenu à la sonnerie cristalline tant vantée des Jaz . MARTEX semble moins explicable et OBA sonnant pour le coup très mal en « au bas »,  il faut peut être y chercher un acronyme dont le B correspondrait à Benel et le O à celui d’Oméga , que présidait Brandt l’autre fondateur , mais rien n’est moins sûr . En revanche OBA apporte la preuve de la recherche d’un nom très court à l’image de LIP comme expliqué plus haut . Si avec DORTU , OZARM , CLERSON , MARTEX et OBA nous avons échappé au moyen et au pire , JAZ déposé le même jour est assurément un coup de génie . Le fondateur Ivan Benel l’affirme lui même  » La marque sur notre réveil fut notre première innovation «  .Toutefois il y a un septième nom , non retenu , mais bien déposé le même jour qui éclaire tout : JAZBAND … Ce style musical pourtant confidentiel et tendancieux pour l’époque a donc bien inspiré l’audacieux Scemama qui l’a judicieusement raccourci pour sa brièveté et son efficacité visuelle , sans doute , mais surtout parce que JAZ était aisé à mémoriser et prononçable sur tous les continents : le succès mondial de la marque doit beaucoup au choix de ce nom qui claque : JAZ                                                                                                                                                                                                                                                                                        Il a si bien réussi son pari que le mot Jaz et réveil sont devenus  absolument synonymes par antonomase au même titre que Frigidaire , Velux , Opinel , Scotch , etc . Voir notre article sur Jaz et les autres antonomases . Voyez , dans notre rubrique Jaz et la Littérature , les romans où l’on emploie le mot Jaz à la place de réveil . Il devient inutile de préciser qu’il est question d’un réveil-matin . Scemama l’avait théorisé et prévu dans un article de la revue Vendre en 1934 : Notons ceci : Jaz ! jamais réveil Jaz ; c’est inutile  c’est même nuisible . On ne parle plus de réveil ; il n’existe plus ce mot , il est remplacé par un synonyme : un Jaz .

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