Plan Métro recto
Plan Métro /Autobus verso Plan publicitaire pour JAZ du métropolitain parisien en 1950 , fermé et ouvert . D’autres marques , comme Perrier , la Reine des Crèmes ou la RATP elle même , ont offert ce même plan commémoratif à leurs clients . Format 19 x 15 cm .
Nous avions décrypté les tickets de métro publicitaires Jaz dans un article complet . On constate que le plan de 1950 reprend , assez logiquement , le slogan des tickets de 1949 : Ne ratez pas votre Métro Réveillez -vous au Jaz avec toutefois un petit rajout : le Réveil de Paris alors que Jaz a très peu revendiqué son origine parisienne hormis avec une Tour Eiffel couronnant le mot PARIS sur la boîte du DRILIC et autres Jazistor de 1964 à 1972 . On retrouve un autre slogan Jaz à l’intérieur du plan : Il y a un JAZ pour chaque pièce de votre appartement JAZ PENDULETTES et REVEILS .
Le plan du Cinquantenaire utilisé par Jaz , entre plat de spaghetti et chevelure de Méduse et autres Gorgones , est le premier plan officiel de la RATP . Nous allons donc dans cet article décrire le contexte dans lequel il s’inscrit : ceux qui veulent approfondir le sujet se procureront l’ouvrage suivant :
l’Histoire du Métro parisien racontée par ses plans , ou sa version anglaise Paris Underground , du même Marc Ovenden aidé de Julian Pepinster & Pascal Pontremoli pour celle éditée par La Vie du Rail en français . On y trouve notre plan , évidemment , parmi ses 176 pages .
Plan de 1901 : une seule ligne verticale . Plan par Cartes Tartide en 1905 , offert par Alhambra : la carte s’est bien étoffée en peu de temps .
La CMP , ou Compagnie du Métropolitain de Paris , juge superflu un plan officiel pour le métro à ses origines ; à sa décharge , reconnaissons qu’il n’y a d’abord qu’une seule ligne , si bien que les plans seront longtemps d’initiatives privés , supports de publicités qu’il faut confier à des cartographes plus ou moins doués , mais tous les plans ne sont pas offerts : un marché se créé .Ce plan était vendu en 1913 . Les huit lignes sont reprises sur les côtés , présentées en thermomètres comme dans les rames ou les autocars .
« thermomètre » apposé dans une rame , avant guerre .
Cartes Taride , un des plus célèbres éditeurs géographes français , publie ce plan en 1930 .Ce grand spécialiste sera choisi pour le plan officiel lorsqu’il voit enfin jour .
Couvertures du plan offert à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1937 Plan de 1936 actualisé de la nouvelle ligne 11 A partir du moment où l’on commence à penser à un plan officiel pour faciliter la vie des utilisateurs du Métro , au fur et à mesure que le réseau s’agrandit , se complexifie , il faut actualiser les plans officiels , mais aussi les autres qui continuent leur vie indépendante .
Bien évidemment , il en va de même quand des stations changent de nom , afin que les voyageurs puissent s’y retrouver. Ci-dessus , la station Allemagne devenue Jaurès , juste après l’entrée en guerre en 1914 : il en fut de même pour la rue éponyme . La station Berlin est rebaptisée Liège pour les mêmes raisons . Après la seconde guerre , quelques stations prennent le nom de résistants , mais la raison du changement de la station Obligado est moins connue . Il ne s’agit évidemment pas de la formule de politesse espagnole Obrigado , mais d’une bataille navale remportée en 1845 contre l’Argentine . En 1947 , la charismatique Eva Peron visite Paris avec une aide alimentaire généreuse pour la reconstruction française , dans son sillage : Obligado devient donc Argentine en 1948 , pour cesser de froisser la fierté de Buenos Aires .
Puis viennent la guerre et ses restrictions de papier , l’uniformisation des teints grisâtres , mais surtout un fonctionnement du métro au ralenti : d’où de nouveaux plans aussi allégés que les rations alimentaires , et même rédigés en allemand pour le tourisme de ces “messieurs un peu trop envahissants” ou en uniformes qui ont un accès gratuit à la Première Classe .London Underground Map par F.H. Stingemore en 1927 : style plat de spaghetti coloré comme les plans parisiens .
À partir des années 1920, le réseau du métro de Londres devient lui aussi très complexe . Le célèbre designer industriel Harry Beck va s’y atteler avec succès . Il était spécialisé dans les schémas électriques qui vont visiblement l’inspirer .
Son plan est extrêmement simplifié , comprenant seulement les stations avec leurs noms et des segments de droites les reliant ; même le tracé de la Tamise ondule verticalement , horizontalement ou à 45 degrés , loin du véritable lit sinueux et ondulant du fleuve londonien . En conséquence le terme de carte souterraine , ou Undeground Map , n’est pas approprié puisqu’il ne s’agit pas d’une carte mais d’un schéma et qu’elle pas vraiment souterraine dans la mesure où 55% des 270 stations du réseau et 402 km de voies étant en surface , ce que l’on nomme à Paris : le métro aérien .
Amsterdam à gauche et Stockholm à droite , un plan de New York ne serait pas un exemple valide , les rues y sont effectivement à angles droits et le Subway également . On le voit avec ces exemples , le plan du métro de Londres de Beck influença grandement le graphisme des cartes de réseaux de transport du monde entier qui reprennent tous ses principes .Projet de plan du métro parisien par Beck lui -même en 1951 : on notera la Seine en trombone bleu , qui fait une seule petite bosse pour les îles de la Cité et Saint Louis , à juste titre d’ailleurs : il n’y a qu’une seule station pour les deux . Plan rejeté par Paris …
La raison du refus de ce « schématisme » par les parisiens est assez rationnel toutefois : les piétons utilisent également les plans du métropolitain en surface pour trouver les rues .
Ce paysan avec sa vache ne va pas prendre le métro : il cherche l’adresse de livraison de son bovin . Le plan se doit donc d’être géographique , quitte à être plus difficilement lisible pour la partie métropolitain .
Fulgence Bienvenüe devant un de ces plans Taride à l’entrée d’une station de style Art Nouveau par Hector Guimard : suite d’un accident de chantier , on constate que le fondateur du métro est amputé du bras gauche . En 1942 , la station Montparnasse est renommée Montparnasse- Bienvenüe en sa mémoire . Le choix porte sur cette station pour sa grande taille , mais aussi parce que Bienvenüe était d’origine bretonne et que depuis l’arrivée du train en Bretagne , le quartier Montparnasse est celui des bretons de Paris . Il pose – ci- dessus -devant un plan extérieur de style deux fois Nouille : plat de nouilles pour la cartographie et de style Nouille pour son entourage en fonte , puisque c’est ainsi que se voit nommer le style Art Nouveau par ses détracteurs trouvaient les lignes trop molles . Mais il faut savoir qu’il s’agit d’une de ses dernières photos de Bienvenüe qui meurt en 1936 .
à l’origine Hector Guimard avait livré ses stations , comme celle-ci de la rue de Rome , sans plan … et pour cause , on vient d’expliquer qu’il n’y avait pas de plan du tout au début et ensuite pas de plan officiel avant bien longtemps .

En 1934 , on ajoute un premier plan rétro-éclairé -d’où son épaisseur et adjoint d’une horloge Brillié – de style Art Déco , bien massif et carré , se mariant fort mal avec le style Art Nouveau de Guimard , pas plus qu’avec la boîte aux lettres victorienne d’ailleurs ou même l’Hôtel de Ville néo-renaissance , à l’arrière plan . Ce prototype des années trente n’a pas été retenu , bien heureusement , et on a eu l’idée de compléter l’oeuvre de Guimard par un plan de même style devant lequel pose donc Bienvenüe plus haut .Le sculpteur Joachim Costa semble faire sortir une rame comme un glaive tranchant de la manche gauche de Bienvenüe , pour sa médaille du Cinquantenaire du Métro en 1950 . En arrière fond , un plan de métro plutôt organique et une inquiétante Seine serpentine , spectaculaire et efficace sur une si petite surface , à savoir 50 mm pour 50 ans , où cette fois l’île Saint Louis apparaît . Notons bien : ce que célèbrent , cette médaille et le plan commémoratif de Jaz , ce sont les cinquante ans du métro pas ceux de la RATP , laquelle était encore bien jeune en 1950 puisqu’elle voit le jour l’année précédente comme la Régie Renault et la SNCF . On évite souvent de le rappeler , mais le métro parisien est d’origine belge ! Si les tunnels, viaducs et stations sont confiés à la Ville , en revanche ceux des accès , des voies et l’exploitation le sont à un concessionnaire , à savoir la Compagnie générale de traction , propriété du baron belge Édouard Louis Joseph Empain .
Ce sont dans les bureaux d’études que sont mises au point les techniques de construction du métro de Paris , financées par un emprunt lancé et souscrit en Belgique , sous la direction du Baron Empain , premier du nom , ancien aide de camp du Roi des Belges qui l’anoblit en 1907 . Paris avait été la première métropole à envisager un chemin de fer urbain en 1845 , elle sera quasiment la dernière à s’en doter pour l’Exposition Universelle de 1900 , afin de ne pas renouveler les embouteillages de l’Expo 1889 . L’attente aura du bon puisqu’il sera électrique et souterrain , l’entrepreneur ayant acquis en outre une belle expérience sur d’autres chantiers . Toutefois en 1901 le marché de la ligne Nord-Sud lui échappe , confié à J-B Berlier qui lui doit tout construire , même les infrastructures . Celui-ci fait moins chiche qu’Empain , qui ayant tout misé sur ses belles entrées par Guimard , rognait sur le reste . La ligne Nord -Sud qui se développe de 1910 à 1916 est mieux décorée de riches mosaïques , de beaux éclairages et belles rames aux couleurs claires . La CPM du Baron Empain va même devoir , comme le faisait déjà Nord-Sud de Berlier , offrir des plans de poches officiels . Le Baron Empain qui avait été général , se consacre effectivement aux transports en commun avec des réseaux de tramways en Belgique et dans divers pays ainsi qu’au métro de Paris que sa société , la CMP ou Compagnie du Chemin de Fer Métropolitain de Paris construit et exploite jusqu’en 1949 . A sa mort son patrimoine comporte 12 sociétés de traction dont le métro parisien , 16 sociétés de fourniture de gaz et électricité , 10 sociétés de portefeuille Electrorail , 4 banques , 6 sociétés immobilières , 3 sociétés hôtelières , 6 sociétés de commerce , 7 sociétés chimiques , 14 sociétés de verrerie , 17 sociétés de construction électrique, mécanique et travaux publics et 3 charbonnages . Si on le voit enturbanné c’est que , distingué égyptologue , il fonde la ville idéale d’Héliopolis , aujourd’hui quartier du Caire , où il est enterré .
Pour la plupart des français , le nom de baron Empain est lié à son petit fils , Edouard -Jean Empain , tristement célèbre pour son enlèvement suivi de séquestration et d’une horrible mutilation en 1978 . Il sera libéré , avec de quoi s’acheter un ticket , près d’une station de métro qu’il n’avait jamais pris mais que sa famille avait construit . Son groupe , Empain-Schneider , pèse alors des milliards avec plus de 150.000 employés et 300 sociétés dont Framatome et les centrales nucléaires , Creusot-Loire ou encore Spie Batignolles le numéro un français des travaux publics qui aménage des ports , fore des tunnels et installe des oléoducs . Ce sont également les chantiers navals de Dunkerque premiers producteurs mondiaux de méthaniers , la Société métallurgique de Normandie , les fabrications d’armes du Creusot , les machines-outils d’Ernault-Somuss , Creusot – Loire Entreprise qui vend des usines clés en main dans le monde entier mais encore Merlin-Gerin dans le matériel électrique , Jeumont-Schneider dans l’électromécanique et enfin Jaz dans l’horlogerie qu’il avait racheté à la demande de l’Etat Français pour sauver le jaseur en perdition et qu’il revendra à Matra en 1979 .
Il faudra attendre 1999 pour que la RATP adopte un plan à la Beck . Les plans continuent de se développer , s’améliorer , d’autant plus que le réseau n’a jamais été figé . Même de nos jours il continue à progresser avec la station de RER nommée Rosa Parks , en hommage à la femme afro-américaine surnommée « mère du mouvement des droits civiques » par le Congrès des USA , judicieusement choisie puisque devenue célèbre en , en Alabama pour avoir refusé de céder sa place à un passager blanc dans l’autobus . Douloureuse situation qui n’est pas sans rappeler celle de Cyrla Szulewicz , employée chez Jaz et mère de Georges Perec qui devait , comme les autres juifs et les « nègres » , ne prendre que la dernière voiture dans le métro parisien pour se rendre à l’usine de Puteaux , avec terminus à la Porte Maillot ou Pont de Neuilly ce qui laisse encore quatre kilomètres à parcourir dans les deux cas .
Jazette Avril 1946 . Les ouvriers se rendaient donc en autobus à l’usine ou grâce au tramway inter-communes de l’avenue Wilson . Il faudra attendre les années 60 pour que métro et RER gagnent la banlieue Ouest , mais Jaz s’était vue expropriée entre temps . Voir notre article ( à venir) sur l’usine de Puteaux . Jaz avait donc fait éditer des tickets et des plans de métro en 1949 et 1950 , c’est dans le cadre de cette offensive publicitaire vers le métropolitain et ses usagers que Jaz lancera une campagne publicitaire dans les couloirs de métro avec ces affiches de René RAVO.
ADDENDA pour approfondir le sujet

Les plus curieux iront consulter les deux documents suivants : cet article Better than Beck sur les tentatives d’améliorer le schéma de Beck pour le métro londonien où Jug Cerovic , un designer parisien excelle : beau retour des choses . Comment parcourir les rues de l’ancienne Königsberg en ne passant qu’une seule fois sur chacun des sept ponts qui enjambent la rivière Pregolia ? Combien de couleurs faut-il pour colorier une carte géographique sans que deux pays limitrophes arborent la même teinte ? Toutes ces énigmes qui réjouissent les amateurs de jeux mathématiques , ont un point commun : elles peuvent être résolues grâce à la théorie des graphes . Malgré son caractère ludique apparent , la théorie des graphes est une des plus ingénieuses et des plus utiles qui soient . Pensez que , grâce à elle , on peut résoudre des problèmes aussi complexes que la planification des circuits de ramassage d’ordures, l’optimisation des process de fabrication industrielle , la conception des circuits électroniques , rendre un plan de métro lisible , la modélisation de structures moléculaires ou la distribution des pièces dans un bâtiment public . Cet ouvrage présenté par Cédric Villani , décoré de la Médaille Fields l’équivalent du Prix Nobel , entré récemment en politique , explique tout cela sans formule mathématique absconse, mais avec de simples dessins composés de points et de traits .